mercredi 17 février 2010

Nouvelles réchauffantes pour temps de grand froid

Pendant que vous vous gelez les pieds et le coeur dans la boue d'Oradour,
j'ai démarché longtemps le théâtre du Soleil
pour les supplier de nous laisser venir voir leur dernière création
Les Naufragés du fol espoir
le dimanche 30 mai à 13 heures
Cartoucherie de Vincennes

Paris-12e. M° Château-de-Vincennes, puis navette.
(rdv sur place : pique nique ?)
Voir un spectacle de Mnouchkine une fois au moins dans sa vie...
Pour vous mettre l'eau à la bouche, cet article du Monde du 16 février :









"Quel voyage ! Quand vous sortez du Théâtre du Soleil, après avoir vu les quatre heures des Naufragés du Fol Espoir, vous êtes secoué, pensif et comblé, comme après une lecture qui vous a emmené dans une enfance ouverte à tous les vents du voyage, au bout du monde et de l'utopie, avec "de l'inconnu, de l'amour, de l'aventure, de l'ambition, du danger, de l'amitié", comme l'annonce le programme.

Mais il y a beaucoup plus : ce sentiment de bonheur extraordinaire que donne le théâtre quand il est porté par un élan collectif comme celui du Soleil. Un élan capable de tout réinventer devant les spectateurs, l'enfance de l'art, le mouvement de la vie, l'envol des idées, et des images, des images, mamma mia !, aussi belles que celles de Jules Verne, dont la lecture a inspiré le spectacle d'Ariane Mnouchkine.

Les Naufragés du Fol Espoir empruntent leur titre aux Naufragés du "Jonathan", un roman difficilement trouvable (sauf par Internet), signé Jules Verne mais écrit par son fils Michel, d'après En Magellanie (Folio n° 3201), un manuscrit laissé par son père à sa mort, en 1905, et jugé trop noir par l'éditeur Hetzel. Ariane Mnouchkine et Hélène Cixous, coauteur du spectacle, se sont inspirées de ces deux livres, tout en puisant aussi dans Le Phare du bout du monde (Folio n° 4036). Mais le spectacle est totalement celui de la troupe, qui navigue entre la Terre de Feu et une guinguette bien française, Le Fol Espoir, le 29 juin 1914.

"Jamais jour n'avait été aussi lumineux !", dit une voix off. Eh oui, rien ne semble alors devoir arrêter le progrès : chaque jour apporte son lot de nouveautés - zeppelin, chemin de fer, téléphone, gramophone et cinéma, cet art naissant dont est fou Félix, le patron du Fol Espoir. Cet homme enthousiaste prête le grenier de sa guinguette à Jean, qui veut réaliser un film. Jean ne doute pas que l'art a sa part dans le grand mouvement vers l'avenir, où l'espoir de la fraternité s'ouvre aux nouvelles générations. Il se lance dans son entreprise : tourner l'histoire d'émigrants partis en bateau de Cardiff, en 1895, pour rejoindre l'Australie, et échoués en Terre de Feu, dans un désert d'eau et de glace.

Ainsi, le plateau du Soleil est porté par un double mouvement, liant le théâtre et le cinéma. Et c'est merveille de voir comment tout cela s'agence et avance. Il n'y a rien dans le grenier de la guinguette. Il faut bricoler des décors, trouver les comédiens, dompter la technique. Tout le monde s'y met, accrochant des filins à des poulies, tirant des décors peints, inventant mille astuces. La première scène montre Rodolphe de Habsbourg dans le pavillon de chasse de Mayerling, en Autriche, en 1889. Il est assassiné à cause de son credo révolutionnaire, qu'il partage avec son ami Jean Salvator : "Au XXe siècle, il y aura une nation extraordinaire, elle s'appellera l'Europe. Deux siècles plus tard, elle s'appellera l'Humanité."

Jean Salvator échappe aux meurtriers de Rodolphe. On le retrouvera en Terre de Feu, où se croisent des utopistes et des requins capitalistes, des missionnaires et de pauvres hères, des amoureux et des solitaires, sur cette terre des Indiens Alakalufs menacés par la cupidité des colonisateurs. C'est fou tout ce qu'on traversera, dans cette épopée tournée en France au moment où l'Europe bascule. Au fil des jours, la vie devient électrique dans le grenier où le temps presse : la guerre est déclarée le 3 août 1914, et le film n'est pas terminé.

Voilà tout ce que raconte le spectacle du Soleil, qui revendique l'innocence et donne autant que les rêves peuvent imaginer : les vagues furieuses du cap Horn, des tempêtes de neige et des scènes d'aventure restituées avec une invention et une beauté à couper le souffle, des moments graves et d'autres burlesques. Mais, plus fort que tout, il y a cet esprit de troupe porté par le désir de ne jamais renoncer. En ce sens, Les Naufragés du Fol Espoir racontent aussi l'histoire du Théâtre du Soleil, qui fête ses quarante-cinq ans. Là aussi, quel voyage !"Brigitte Salino

dimanche 14 février 2010

Métropolis au 21ème siècle

Bonsoir les amies!
Voici un film qui pourrait être intéressant pour le groupe qui joue dans le style cinéma muet. (Anastasia, Charlène, Margot, Laurine et Camille)
Ce film Métropolis au 21è siècle de Fritz Lang passait hier soir sur Arte, j'ai pensée que vous pouviez le regarder pour vous donner encore d'autres idées à améliorer votre jeu sur le regard et l'expression. Voici le lien qui va vous permettre de revisionner le film :
http://www.arte.tv/fr/Echappees-culturelles/metropolis/Cette-semaine/2006912,CmC=2004818.html

J'espère que vous trouverez de nouvelles sources ici :)
A Lundi!

jeudi 11 février 2010

A mettre dans ses valises...



N'oubliez pas de glisser dans vos valises, outre quelques bon paquets de kleenex, le texte d'Homère et le synopsis de notre travail et la distribution des groupes pour pouvoir réfléchir à vos propositions.
Je vous rappelle qu'à la rentrée, le lundi 8 mars, Marc et moi attendons de pied ferme :
- la proposition aboutie de vos premières séquences
- une ébauche de la nouvelle séquence suffisamment engagée pour qu'on puisse vous guider pour la suite du travail

Donc, petit rappel :
Episode 3 Le banquet chez Alcinoos : Romane, Jane, Alice
- Imaginer la disposition et l'habillage de la salle polyvalente (en pensant aux espaces disponibles pour les épisodes enchâssées, type Cyclope et en allant chercher dans le texte la description de la Phéacie pour s'en inspirer : chant VII v. 1-132)
- Penser le menu de ce qui sera servi aux spectateurs
- Ecrire et mettre en scène l'arrivée d'Ulysse à la cour d'Alcinoos (texte et idées à prélever dans les chants VII v. 133 à la fin et VIII v. 521 à la fin) puis son départ (voir début chant XIII)
- Intégrer musique, aède, danseuses, masques ? Créer du merveilleux.
Ulysse à la cour d'Alcinoos, par F. Hayez 1815
Episode 7 Chez les Cimmériens : Laurine, Valentine, Anastasia, Amanda, Agnès
- Ecrire et mettre en scène à partir du récit au chant XI et notamment v. 14-50 : arrivée d'Ulysse et description du pays, v. 90-149 (Tirésias), v. 150-234 (la mère), v. 385-464
(Agamemnon) et v. 465-540 (Achille)
- Créer des apparitions fantastiques : travailler sur le spectral
Gravure du XVII censée représenter Homère (assimilé à Ulysse mendiant)
Episode 8 Ulysse mendiant : Clémence, Camille
- Imaginer déambulation qui doit conduire le spectateur de la salle poly à l'amphithéâtre : quel parcours, quoi sur le parcours, quelle(s) rencontre(s) ?
- Ecrire et mettre en scène la rencontre d'Ulysse mendiant à partir du texte : chant XIII v. 287 à la fin : écrire texte de la voix off d'Athéna et s'inspirer du passage pour imaginer le costume d'Ulysse
Episode 9 Le massacre des prétendants : Natali, Marine, Cynthia, Charlène
- Imaginer le tableau collectif sanglant que le spectateur doit découvrir dans l'amphithéâtre à partir de recherches iconographiques
- Distribuer un récitant qui devra apprendre le texte du résumé du chant XXII (p. 351 dans l'édition Jacottet) et être capable de le faire entendre en extérieur
- Créer un tableau tragique : horreur et pitié. Le spectateur doit être saisi.
Episode 10 : Happy end en comédie musicale : Assia, Morgane, Elodie, Margot
- Imaginer et mettre en espace dans l'amphithéâtre du Lycée une chorégraphie pour toutes : Ulysse et Pénélope se retrouvent et chantent leurs retrouvailles au milieu des compagnons- marins
- Apprendre et distribuer le texte de Marc
- S'inspirer de Jacqus Demy, et notamment des Demoiselles de Rochefort.

Bon voyage, bon courage et surtout bonne création...

jeudi 4 février 2010

Faire des recherches iconographiques : des pistes pour le massacre des prétendants

L'enjeu pour le groupe qui va s'atteler à l'épisode 9 (Marine, Natali, Cynthia et Charlène), c'est de parvenir à construire un tableau saisissant dans l'amphithéâtre du Lycée : le spectateur doit être saisi d'effroi et d'horreur et l'image doit être composée de façon à marquer les esprits et à entrer en écho avec le récit du massacre déclamé par une récitante.
Bien sûr, il faut revenir au texte (le massacre occupe la totalité du chant XXII ! Ni Homère ni Ulysse n'y vont pas de main morte).
Mais on peut aussi chercher du côté de la peinture puisqu'il s'agit bien de créer et de composer un tableau, d'organiser des matières, des volu
mes, des couleurs et des formes à partir des corps des camarades.
En tapant "massacre des prétendants" dans Google, on tombe sur des images directement inspirées d'Homère, comme celle-ci, qui provient d'un vase grec du IVème siècle avant J-C et où la profusion et la confusion des corps, l'impression de mouvement et de mêlée chaotique est intéressante à analyser.
Mais une recherche iconographique ne se contente pas d'être littérale. Par association d'idées, on peut aller du massacre des prétendants à celui des Innocents, épisode de la Bible qui a inspiré beaucoup de peintres parmi les plus grands, et où la recherche
d'une expression saisissante de la violence par le mouvement des corps et l'orchestration des volumes et des lignes ne peut qu'inspirer.

On rencontre alors les célébrissimes tableaux de Rubens.
Ce qui nous amène, en élargissant encore d'un cran la recherche et en suivant le fil de nos idées, à une autre célébrissime toile : Guernica de Picasso, où l'expression de la tragédie sanglante a trouvé une apogée.
Bien sûr, collecter des images ne suffit pas : ce qui compte c'est d'analyser les moyens convoqués par l'artiste pour exprimer la violence et de s'en inspirer en les transposant sur le plateau.
Mais cela, c'est votre affaire...

Dom Juan, Molière et les Dévôts


Le vray portrait de Mr de Molière en habit de Sganarelle, gravure de Simonin, XVIIème siècle

En écho au cours de lundi dernier sur notre ami Jean-Baptiste, un document édifiant.
Le Sieur de Rochemont, auteur de ce "libelle", c'est-à-dire de ce petit texte pamphlétaire et diffamatoire, a assisté à la Première du Festin de Pierre (titre original du Dom Juan de Molière), le 15 février 1665.
Il a visiblement eu du mal à s'en remettre.
C'est un témoignage éclairant sur la violence des attaques que Molière a subies à l'époque.
Mais ce triste sire sait lire : sa lecture au vitriol du personnage de Sganarelle que Molière s'était réservé d'incarner n'est pas si sotte : elle pointe la subversion propre du rire et de la farce. Sganarelle est peut-être plus subversif que Dom Juan...
ET n'oubliez pas qu'hypocrite vient du Grec ancien ὑποκριτής qui signifie... "acteur" !

B.A. Sieur de Rochemont, Observations sur une comédie de Molière intitulée Le Festin de pierre (libelle paru en 1665 à Paris, chez N. Pepingui)

Qui peut supporter la hardiesse d'un farceur qui a fait plaisanterie de la religion, qui tient école du libertinage et qui rend la majesté de Dieu le jouet d'un maître et d'un valet de théâtre, d'un athée qui s'en rit et d'un valet, plus impie que son maître, qui en fait rire les autres ?

Cette pièce a fait tant de bruit dans Paris, elle a causé un scandale si public, et tous les gens de bien en ont ressenti une si juste douleur que c'est trahir visiblement la cause de Dieu de se taire dans une occasion où sa gloire est ouvertement attaquée, où la foi est exposée aux insultes d'un bouffon qui fait commerce de ses mystères et qui en prostitue la sainteté, où un athée, foudroyé en apparence, foudroie en effet et renverse tous les fondements de la religion...

Il serait difficile d'ajouter quelque chose à tant de crimes dont la pièce est remplie. C'est là que l'on peut dire que l'impiété et le libertinage se présentent, à tous moments, à l'imagination ; une religieuse débauchée, et dont l'on publie la prostitution ; un pauvre à qui l'on donne l'aumône à condition de nier Dieu ; un libertin qui séduit autant de filles qu'il en rencontre ; un enfant qui se moque de son père et qui souhaite sa mort ; un impie qui raille le Ciel et qui se rit de ses foudres ; un athée qui réduit toute la foi à deux et deux sont quatre et quatre et quatre sont huit ; un extravagant qui raisonne grotesquement de Dieu et qui, par une chute affectée, casse le nez à ses arguments ; un valet infâme fait au badinage de son maître et dont la créance aboutit au Moine bourru, car pourvu que l'on croie le Moine bourru tout va bien, le reste n'est que bagatelle ; un démon qui se mêle dans toutes les scènes et qui répand sur le théâtre les plus noires fumées de l'Enfer ; et enfin un Molière, pire que tout cela, habillé en Sganarelle, qui se moque de Dieu et du Diable, qui joue le Ciel et l'Enfer, qui souffle le chaud et le froid, qui confond la vertu et le vice, qui croit et ne croit pas, qui pleure et qui rit, qui reprend et qui approuve, qui est censeur et athée, qui est hypocrite et libertin, qui est homme et démon tout ensemble : un diable incarné comme lui-même se définit...

... Il faut avouer que Molière est lui-même un Tartuffe achevé et un véritable hypocrite.