mercredi 19 janvier 2011

Extrait d'analyse d'Ithaque.



Ithaque est une pièce retraçant le retour d’Ulysse dans sa patrie d’où son nom Ithaque, est le dernier chant de L’Odyssée. Nous sommes alors confrontés aux retrouvailles du couple d’Ulysse et de Pénélope, mais également du combat que doit mener Ulysse afin de récupérer ses biens ( son épouse, son palais,…). Nous pouvons alors nous demander pourquoi mettre en scène une épopée quasi mythique, que tout le monde connaît car rare sont les personnes n’ayant jamais entendu les aventures d’Ulysse . Nous pouvons également nous demander pourquoi Jean-Louis Martinelli a voulu s’approprié Ulysse et ses aventures le temps d’une mise en scène, car en choisissant une épopée antique et « archi-connue » il y’avait un risque considérable. Ce qui nous amène à nous poser la question suivante : Comment jouer une épopée antique tout en la réinventant afin qu’elle soit moderne, et qu’elle corresponde à notre époque actuelle. Afin de répondre à ces questions, et cerner les enjeux d’Ithaque, nous traiterons l’axe suivant : les représentations inhabituelles et contemporaines des personnages.


 



 


Ithaque, est une « réécriture » des derniers chants de L’Odyssée, cette écriture a alors conserver des éléments de cette œuvre, mais également se basé sur d’autres œuvres telles que L’Iliade, notamment afin de donner une description des personnages.


Dans Ithaque, le comédien jouant Ulysse est un homme assez vieux ce qui fait écho à ses vingt ans d’absence ainsi qu’au poids de ses aventures qui lui ont « dérobées » sa jeunesse. Le comédien a donc un corps vieux, pas spécialement harmonieux et pas spectaculaire contrairement à la vision du spectateur qui image un homme viril, beau, fort et bien battit suite à sa description dans l’Odyssée. En prenant le comédien Charles Berling afin d’interpréter Ulysse, Jean-Louis Martinelli a fait le choix de représenté un Ulysse victorieux de part sa ruse. Cependant cette représentation d’un homme sage fait de l’Ulysse d’Ithaque une sorte d’anti héros. Celui-ci ne parvient pas à s’exprimer clairement au début de la pièce, il bégaye, et pleurnichera à plusieurs reprises, comme dans la scène suivant le massacre Ulysse s’effondrera et pleura comme une enfant, c’est alors la nourrice qui s’occupera de lui et l’assiéra sur une chaise en bois qui ressemblera étrangement à celles des petits enfants. Ulysse est alors caractérisé comme un homme vieux, sage, sensible qui lui donnera l’image d’un homme-enfant ce qui ne correspond pas à la vision « universelle » que l’on se fait de ce personnage. Dans L’Odyssée, Ulysse est une héros extraordinaire de part son inventivité et est une victime de sa beauté auprès des femmes et déesses telles que Calypso ou Circé. Contrairement à l’Iliade où Ulysse n’est tout d’abord pas un personnage central à l’intrigue et est connu grâce à ses plans un peu saugrenus et ses tromperies permanentes, il n’incarne pas le personnage héroïque contrairement à celui de L’Odyssée. Nous pouvons alors penser Strauss s’est principalement inspirer de l’Iliade afin de dresser le portrait d’Ulysse tout en utilisant les aventures de celui-ci évoquées dans L’Odyssée.


Le personnage de Pénélope a également été confrontée au changement d’époque dans la mise en scène d’Ithaque. La comédienne jouant Pénélope est Ronit Elkabetz, une femme très orientale de part son accent et ses rondeurs. Le choix de Jean-Louis Martinelli s’est alors poser sur la représentation d’une Pénélope étrangère et guerrière. Lors des premières apparitions de l’actrice celle-ci est énorme da part sa corpulence, elle semble monstrueuse à cause de cette difformité : son visage et très beau et son corps assez laid. Elle ne peut se déplacer seule, elle est essoufflée à chaque mouvement, elle semble pathétique, ridicule comme vulnérable en l’absence de son époux. Même les symboles de féminité sont ici répulsifs, sur sa robe bordeaux une sorte de soutien gorge est dessiné en viole, cela fait alors ressortir son importante poitrine qui n’a plus la connotation d’un certain érotisme. Cependant cette difformité cache l’intelligente de celle-ci car elle a dissimulée son propre corps, en effet lorsque la nuit tombe celle-ci ôte sa robe bordeaux bouffante qui lui donne cette allure. C’est alors afin d’effrayer et de repousser les prétendants qu’elle se déguise, par ailleurs cette astuce met en avant sa puissance, elle n’est pas seulement un épouse attendant son mari mais une battante et une reine. Même si la robe insiste sur sa monstruosité et son étrangéité, celle-ci lui permet également d’exercer son autorité, ses fromes font de ce personnage une guerrière prête à se battre afin de conserver son palais et de garder dans les mémoires le souvenir d’Ulysse, elle doit résister à l’omniprésence et l’arrogance des prétendants qui ne croient guère au retour d’Ulysse. D’ailleurs lorsque celle-ci sermonne les prétendants sur leur comportement irrespectueux envers elle, Télémaque, Ulysse et son palais, l’estrade avant vers eux comme si la colère de Pénélope était telle qu’elle parvenait à touché physiquement les prétendants; par ailleurs ce dispositif scénique n’est pas sans rappeler celui du théâtre antique (skéné). L’accent de la comédienne ainsi que son maquillage font référence au voyage notamment à l’Orient, son maquillage avec beaucoup d’eye liner fait penser à une autre femme très puissante qui est Cléopâtre quant à son accent celui-ci apporte une certaine mélodie à son discours qui peut faire penser à celui des sirènes ( même si ces deux « chants » n’ont pas les mêmes connotations). Cette représentation de Pénélope est très surprenante, car c’est elle qui incarne la figure du héros en quelque sorte car comparé à un Ulysse qui se complaint de leurs pleurs même lorsqu’il arrive chez lui, Pénélope semble avoir beaucoup plus de poids face au « chaos » qui règne à Ithaque. C’est comme si dans cette pièce, il y avait une inversion de la figure du pouvoir, qui correspond sans doute à l’évolution du statut de la femme qui est à présent égal à celui de l’homme, peut-être que Botho Strauss souligne le fait que la femme est autant capable de régner qu’un homme, si ce n’est mieux que celui-ci. Contrairement à L’Odyssée où Ulysse est le personnage dominant et où la seule fonction de Pénélope est de l’attendre.


Dans Ithaque, les prétendants sont habillés en costume noir et la plupart portent des lunettes de soleil. Leur rôle n’est traité différent si ce n’est qu’ils ressemblent à de vrais machos qui ne voient qu’en Pénélope un trône et rien d’autre. La figure des prétendants peut être assimilée à celle de la mafia du fait qu’ils soient manipulateurs et « profiteurs », ils escroquent Ulysse en mangeant toutes ses bêtes et en s’acharnant sur son épouse Pénélope. Tout comme l’actrice Ronit Elkabetz, la majorité des prétendants ont un accent afin de rappeler le fait qu’ils viennent de régions différentes et qu’ils viennent seulement conquérir une autre terre, leur intérêt est donc politique. La représentation de Télémaque est quasi similaire à celle des prétendants, il est jeune et est vêtu de noir, en l’absence de son père c’est alors à lui de prendre le pouvoir cependant il ne semble pas assez fort et ne parvint à chasser les prétendants.






En conclusion , Jean-Louis Martinelli donne des images à disposition du spectateur afin que celui-ci imagine le massacre ou la figure de Zeus. Chacun à sa propre vision de l’Odyssée et c’est pour cela que le metteur en scène nous « laisse le choix » afin de nourrir notre imagination. Grâce à de nombreux dispositifs scéniques Jean-Louis Martinelli a su faire voyager Ulysse et son palais à notre époque, même si l’intrigue reste inchangée la mise en scène et le texte de Botho Strauss transposent les problèmes politiques, familiaux à un homme contemporain. Cependant cette comparaison entre la figure d’Ulysse et un homme moderne pose la question suivante : Est-ce qu’un homme serait il prêt à utiliser la ruse, la dissimulation, l’art du langage afin d’atteindre comme Ulysse son objectif ?

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