jeudi 28 avril 2011

Journal de bord du 28 Avril 2011

1ère HEURE :

Comme à chaque séance nous avons parlé du projet et laisser quelques propositions émaner de chacune pour faire avancer le travail général. Nous avons aussi attribué à chaque personne le matériel (peinture, bassine, bâche, gaffe,…) à apporter pour le stage qui allait très vite arriver. Puis pour finir l’heure nous avons parlé du déroulement du stage.

2ème + 3ème HEURE :

Deux heures de pratique entièrement consacrées à Nono. Dans un premier temps la troisième partie (c’est-à-dire la partie juste après les Cassandre) ensuite nous avons travaillé la 2ème et la 3ème parties à la suite.

Nous nous sommes attardés sur plusieurs passages que l’on n’avait pas encore trop travaillés. Comme la section 8 (Dans le mur des pierres mortes) de l’acte 1, où il était question de donner une impression de vie ; le but était de former des sortes de sections comme si le spectateur regardait à travers la fenêtre d’un appartement. On devait reproduire une image de la vie quotidienne de manière très mécanique et plaquée.

Plusieurs découpages ont été effectués notamment dans la troisième partie.

Personnellement cette séance était importante pour moi car c’est la première fois que je me suis vraiment amusée en « jouant » Nono. Et depuis j’ai l’impression d’être plus attentive aux séquences de travail sur Novarina et mieux « entendre » le texte. Je me sens plus réceptive aux moments drôle et même aux moments plus simples...

Charlène

En cours de théâtre nous nous sommes concentrés sur la partie "2" de Novarina. J'ai beaucoup apprécié ce cours car j'ai enfin trouvé ma place. J’ai même pris du plaisir à jouer, ce qui avant me paraissait impossible. Et chaque personne du groupe m'a paru complètement engagée et investi à 200 %.

Je pense que nous avons toute pris beaucoup de plaisir et que nous avons franchi une étape considérable en ce qui concerne le cheminement du travail porté sur N. Mais j'ai donc trouvé que tous les groupes concernant Agamemnon ce sont beaucoup améliorés également car je pense que plus on avance dans une partie du travail et plus on se libère et plus on prend confiance en soi.

Effectivement nous avons beaucoup avancé et le travail est devenu extrêmement intéressant puisque pour ma part j'ai pris beaucoup de plaisir. Je me suis lancée sur le plateau en oubliant tout, en regardant plus loin que mon reflet, en y croyant dur comme fer, et en prenant cela avec ironie et je dois dire que pour moi cela a marché.

Maintenant le travail ne peut qu'avancer...

Clémence

lundi 25 avril 2011

Pompe à Phynances

Message moins agréable mais nécessaire : pour celles qui n'auraient pas encore soldé les comptes (sorties et stage), il devient urgentissime de faire sortir le carnet de chèques à vos géniteurs.

lundi 18 avril 2011

Dans la tête de Cassandre


Toile de Jean Miotte (très Cassandre non ?)





En songeant à la boîte noire de Cassandre, ce que nous allons y peindre, et la manière dont il nous faudrait procéder, une chose m'est revenue en tête (je ne sais pas si nous l'avions déjà évoqué, peut être implicitement). Notre voyante à matelots est traversée par des émotions, des messages, des images qu'elle ne contrôle pas, qui émanent du plus profond d'elle même ou qui lui sont tout à fait étrangères, mais cela sort, jaillit de son corps, le traverse, et le message prophétique est projeté, comme vomi. D'une certaine manière, traduire un message divin et opaque physiquement, et dans notre cas, avec de la peinture, m'a fait penser à la peinture automatique.
Elle émane du courant surréaliste, qui revient souvent dans notre travail. André Breton définit le Surréalisme comme une "dictée de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale [...] et repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d'associations négligées jusqu'à lui". Nous ne sommes pas loin du monde de l'Inconscient, des choses sales qu'on a en nous, de ces évènements qui nous dépassent et émergent de nous. Ici la définition générale de ce courant artistique très étendu (qui est valable pour l'écriture, la peinture -avec Dali notamment-, la photo, et le cinéma -preuve en est du Chien andalous) rejoint notre démarche, en ce qui concerne la peinture.
Cassandre "récite" ce qu'Apollon, son bourreau, semble lui chuchoter à l'oreille (cela pourrait se rapprocher de cette "réalité supérieure" dont parle Breton), et sa bouche "crache" la prophétie (nous avions parlé du crachat, pour que l'une de nous crache de la peinture sur la toile). Sa transe est bien entendue psychique, elle est assaillie par la vision des enfants "portants à pleines mains leur propre chair", mais cette transe est, comme nous l'avons expérimenté sur le plateau,
physique (elle "tournoie") et assez synesthésique. Comment traduire cette pensée divine, ce message divinatoire, cette violence des images , en quelque chose de visible, de palpable ?
Notre solution, nous l'avons trouvé, mais elle peut encore évoluer : cette peinture (jaune et blanche) qui vient souiller la toile noire, en jets, en giclées, en traits vifs, en gouttes,
tout un entremêlement de touches tourmentées, qui anticipent sur le trouble, le bouleversement de notre Cassandre, qui ne nous disent rien de représentatif (pas de bébés rôtis dessinés clairement) mais qui parlent à l'imaginaire, et disent quelque chose du sang, du coup de poignard, du massacre de Troie. L'image s'imprimera sur la rétine du spectateur, obsédante, et lui restera en mémoire de manière inconfortable, comme le message urgent de Cassandre que personne ne comprend.

Pistes de mouvements pour le Novarina lorsque nous peindrons : amples, dansées, saccadés, qui pourraient créer des jets de peintures expressifs et tourmentés. Nous pouvons nous inspirer de l'univers pictural novarinien que nous commençons à bien connaître, à travers sa scénographie (nous l'avons presque toutes vu dans le Vrai Sang, et dans la captation de L'Acte Inconnu), mais aussi celle de Pollock, que M.Dieudonné souligne fréquemment et qui sont source d'inspiration pour nous. J'ai trouvé quelques tableaux de George Matthieu qui sont très intéressantes pour nous.


Louches ivresses
George Matthieu

On dirait une qui est peinte ici, une croûte cicatrisée qui s'ouvre de nouveau. Une superposition de trait droit, épais et pleins, puis ce rouge fou qui se jette par dessus. Ce mouvement de la peint
ure me fait penser à ce premier de constatation abasourdie de Cassandre, puis ce délire qui monte en elle et explose.


Passé Fantôme - George Matthieu
Beaucoup plus sombre et viscéral, on a tout de suite des images de cr
imes, de boucherie en tête. Ce rouge et ce noir nous touchent, observateurs. Cela me fait penser à la "terreur dégoulinante de sang" de Jane, cela blesse les yeux, une impression de malaise très forte.







Jackson Pollock - Untitled 1942-44

J'aime bien cette toile de Pollock, un peu différente de ses autres toiles très touffues et opaques. Ici la couleur est là, c'est plus vivant, et on sent les différents mouvements qui habitent la toile, des traits amples, des giclées, des gribouillages... Ce qui est troublant ce sont ces bouts de visages
qui émergent de ce magma organique de couleur, comme des restes humains au milieu de la pâture.





Danse de l'espace avant la tempête - Karel Appel (1959)

Une toile de l'un des artistes du mouvement Cobra, c'est étrange comme le titre de la toile me fait penser à notre étape de travail. La tempête, c'est un peu ce qui se passe dans la tête de Cassandre, c'est le bouleversement dans le royaume d'Argos, c'est ce qui gronde. Et le travail dans le Novarina est une sorte de sas avant ce trouble, ce cataclysme, une préparation et une "installation" du drame. Or nous travaillons avec l'espace, c'est notre matériau, et nos trajectoires, notre gestuelle, sont une sorte de danse. Cette toile possède des choses que l'on peut piller, il y a ces grandes étendues noires (qui peuvent être reproduites dans la couleur voulue en se roulant sur la toile noire), ces lignes qui se rejoignent et font des noeuds ensembles, ces traces qui peuvent être faites par une main, rapidement et de manière vive, instantanée...

Quelques exemples d'abstraction lyrique, dont la réalisation semble beaucoup plus apaisée que les toiles précédentes, donc moins intéressantes pour nous du point de vue de la réalisation, mais l'univers vaporeux et trouble n'est pas sans nous rappeler la peinture romantique, et l'expression d'un mal être, d'une tourmente...



Synchromie en rouge - André Rouquet
Une toile de Jean Miotte


jeudi 7 avril 2011

Journal de Bord - Séance du 07/04

Durant la première heure, nous avons comme à chaque début de séance fait le point sur notre travail, tout en profitant du soleil dans la cour du lycée. Dans un premier temps nous avons parlé du tissu à utiliser pour notre projet, qui doit de préférence être légé. Puis nous avons abordé le sujet de l'insertion de Matamore dans notre travail, puisque je le rappelle, notre travail consiste à construire un projet cohérent d'un point de vue dramaturgique à partir de trois œuvres théâtrales différentes : L'Acte Inconnu de Valère Novarina, Agamemnon d'Eschyle et enfin l'Illusion comique de Pierre Corneille. Matamore qui est un personnage masqué de la comedia dell'arte participerait donc à la production générale en tant qu'ouvrier du drame, mais s'en échapperait parfois en prenant le contrepoint de ce qui se joue. En effet, Matamore est un vantard, un fanfaron qui pourrait être une figure parodiée du personnage d'Agamemnon, de l'Agamemnon qui justement jusqu'ici était "absent" dans notre travail (si ce n'est lorsqu'on voit son cadavre et celui de Cassandre). De plus Matamore aurait de la peinture sur le visage , comme les autres personnages: mais il reste encore à trouver de quelle couleur serait la peinture et de quelle manière l'étaler. Personnellement je pense que le jaune et le rouge sont des couleurs primaires qui iraient parfaitement au personnage de Matamore, rappelant à la fois la comedia (couleurs vives) et le personnage d'Agamemnon. Matamore pourrait être "masqué" de peinture sur tout le haut du visage, ne laissant apparaître que la bouche (puisque Matamore est un personnage du langage), ou encore même l'inverse. Nous avons ensuite fait la distribution de la conduite de travail et donc nous avons pu prendre du recul et avoir un regard global sur là où nous en étions. Nous avons notamment fait la distribution du personnage de Matamore :
- le premier Matamore, pris en charge par Assia apparaîtra lors de l'énumération des créatures Novariniennes faite par Agnès dans la première partie.
- le deuxième Matamore, pris en charge par Valentine apparaîtra en fait comme une figure parodiée du personnage d'Agamemnon, à son retour de Troie : puisqu'il s'agit d'un moment épique et que c'est à ce moment là que Matamore se vante de ses "prouesses" guerrières. La parole donc à la fois burlesque et épique du personnage donnera à voir au spectateur un Agamemnon parodié, vantard, et cela établira en même temps un lien entre les différentes pièces (=cohérence).
- le troisième Matamore, pris en charge par moi-même, apparaîtra de nouveau comme une figure parodique du personnage d'Agamemnon, juste avant les premières Clytemnestre. Il s'agirait donc de faire apparaître/naître un Agamemnon fanfaron, qui se vante et parle de ses conquêtes suprêmes (comme Cassandre).
- le quatrième Matamore, pris en charge par Margot, précédera l'épisode des Cassandre. Il s'agit du discours menaçant que Matamore lance à Clindor dans l
'Illusion comique, mais qui ici serait à destination de Cassandre, puisque l'étrangère va être violemment tuée par Clytemnestre par la suite.
- enfin le dernier Matamore, pris en charge par Elodie, apparaîtra avant les scènes de massacres en prononçant un discours de peur et de fuite annonçant donc bien ce qui arrive.
Nous nous sommes également posé une question cruciale à propos du personnage de Matamore qui est : comment le jouer ? Je pense que la réponse à cette question nous viendra en travaillant sur le plateau, et chacune de nous (Assia, Margot, Valentine, Elodie et moi) devra trouver son propre Matamore. Mais nous avons tout de même établit une "contrainte" qui est qu'il faut démarrer à partir du plateau pour jouer Matamore : comme si il naissait en quelque sorte du plateau. Pour conclure, nous avons parler du stage qui approche maintenant à grands pas et du matériel dont nous aurons besoin une fois là-bas : tout d'abord du matériel d'enregistrement pour l'éloge théâtrale finale qui sera un assemblage/un mix de toutes nos voix, puis des draps et de la peinture en suffisance (peinture que nous aurons distribuée et mise en bouteilles le 28 avril).

Puis nous sommes passés à la pratique lors des deux dernières heures, et nous avons complètement traversé le Novarina 2 (soit la seconde partie du travail sur Novarina). En effet, sans prendre la peine de nous échauffer, nous avons repris le travail de Novarina là où nous l'avions laissé, et nous avons fait comme si on reprenait tout à zéro. Pour ma part j'avais une petite appréhension par rapport à ce qui allait se passer sur le plateau, or je pense que chacune de nous a finalement bien compris comment se pratiquait le théâtre de Novarina (notamment grâce au exercice de diction de la semaine précédente). De plus, n'ayant pas de partition à charge dans cette partie du travail j'ai pu beaucoup observer les autres ; ce qui fut à la fois plaisant et intéressant. Lorsque l'une d'entre nous entrait en jeu, elle s'appropriait directement le plateau et l'espace, en étant très engagé. Nous étions en fait pendant ces deux heures en plein travail de création. En arrivant sur le plateau, il ne fallait plus penser à son texte , mais au contraire se laisser emporter par celui-ci et voir où cela nous conduisait. Pour jouer Novarina, il faut en quelque sorte s'abandonner sur le plateau ; nous devons trouver notre "monstre" novarinien, laisser parler notre imagination, notre corps. De plus, il fallait pouvoir entrer sur le plateau à n'importe quel moment du jeu : ainsi chacune de nous était présente, attentive et réactive à ce qui se passait sur le plateau. De ce fait, de belles propositions sont nées comme par exemple lorsque Assia en jouant sa partition de texte se retourna vers Clémence, qui réagit alors instinctivement, comme si ce qu'elle venait de dire lui était adressait, en faisant un bond sur sa chaise et en poussant un petit cri. Il fallait notamment être en jeu dès que l'on entrait sur plateau et ce qui était intéressant était de voir par quelle extrémité de notre corps nous pouvions entrer, et dans quel dynamique. Je pense alors à la proposition de Cynthia qui entrait sur le plateau en étant comme "guidé" par son doigt : le reste de son corps ne faisait que suivre son doigt, ce qui tout en créant quelque chose de l'ordre rythmique/chorégraphique provoquait également le rire. Pour jouer Novarina, il ne faut pas penser avec notre tête mais avec notre corps. Il ne faut notamment pas hésiter à entrer sur le plateau même si ce n'est pas encore à notre tour de jouer : notamment comme ce fut le cas pour Marine, Nataly et moi-même qui n'avions pas de partition de texte dans cette partie. Après avoir traverser entièrement le Novarina 2 nous l'avons refait à nouveau et cette fois nous devions toutes les trois tenter d'intervenir. J'avoue qu'au début je me demandais ce que j'allais bien pouvoir faire et cela m'est en fait venu naturellement. Lorsque Assia s'est levée et est entrée en jeu je l'ai suivi comme une sorte de "double", je copiais exactement chaque geste et expression qu'elle faisait, et un jeu se créa donc entre nous. Puis je fus moi-même surprise par Amanda qui entra en scène juste après et se mit à "jouer" avec moi : une seconde proposition naquit alors à la suite de celle que j'avais avancée. Mon corps ne faisait que suivre le rythme, le mouvement et je ne pensais strictement à rien: j'offrais simplement des propositions de jeu. Enfin, ayant toutes très bien compris "le système" du théâtre Novarinien, nous avons même eu le temps de commencer à travailler le Novarina 3 (que nous reverrons entièrement lors de la prochaine séance), pour lequel de belles propositions sont nées également, notamment avec le chien. Pour jouer Novarina il ne faut donc pas hésiter à prendre des risques, cela ne peut-être que bénéfique à la progression du travail et à notre propre progression en tant que comédienne : c'est un travail collectif et de création (infinie). Je pense que cette séance fut très constructive, et j'y ai personnellement pris beaucoup de plaisir ( que se soit en tant que comédienne ou en tant que spectatrice). Je pense que nous avons beaucoup progresser et avancer dans le travail lors de cette séance.

dimanche 3 avril 2011

Une piste pour les Cassandre : Raymond Depardon et l'hôpital de San Clemente


Devant les Cassandre jeudi dernier, j'ai trouvé que cela devenait très intéressant quand le corps était engagé et investi dans des gestes, des postures, des mouvements non réalistes, un peu étranges, et que leur développement "étrangéifiait".
J'ai songé alors qu'il serait intéressant de travailler et de développer ces partitions de gestes de chacune, quand une Cassandre est en jeu (trajectoire, mouvements), mais aussi lorsque les autres sont en arrière plan, dos à nous - un peu sur l'exemple du geste de la main que propose Jane.
Je pense qu'il serait intéressant qu'elles recherchent le développement d'un geste, d'un mouvement, d'un déplacement, très lentement, très discrètement mais de manière continue et que ce geste dise quelque chose de l'état de claustration, de folie, de désespoir de Cassandre dans l'épisode et entre en résonance avec le texte de premier plan. Et quand elles sont en jeu, que ce geste se poursuive, se développe, bifurque, évolue sur cette "lancée".
J'ai songé au film documentaire (1982) et aux photographies (1978-1979) que le grand photographe Raymond Depardon (à découvrir d'urgence ! Lisez La ferme du Garet, voyez ses documentaires sur la justice, sur San Clemente bien sûr, et aussi les derniers, la série Profil paysan) a consacré à l'hôpital psychiatrique de San Clemente en Italie qui propose une vision de la folie débarrassée de son pathos et de ses préjugés, un regard au plus près de l'humain, de la souffrance mais aussi ouvertement politique.
Voici quelques photos qui pourraient inspirer certains gestes et travail du corps dans ce moment de notre travail.