mercredi 8 décembre 2010

Analyse de spectacle/ Klaxon, Trompettes et pétarades/ Marc Prin/ Nanterre

Les personnages:


Antonio est le personnage principal de la pièce mais il n'intervient pas dés le début et intervient de manière décalée: comme un régisseur ou un metteur en scène intervient pour interrompre une répétition parce que quelque chose ne va pas, en effet lorsqu'il arrive sur la scène pour la première fois, son apparition est assez étrange, le spectateur ne comprend pas tout de suite si c'est fait exprès ou si il intervient réellement en tant que membre extérieur. On est donc face à ce personnage au grand sourire et aux grands yeux globuleux qui nous fait rire dès son arrivée: ses gestes, ses mimiques, ses expressions du visage qui semblent être poussées a l'extrême lui donnent ce côté clownesque et le rendent captivant. On l'écoute attentivement et l'on cherche à comprendre ce dont il veut nous parler, bien que ses explications soient pour le moins extravagantes et parfois mensongères. De plus dans la suite de la pièce l'acteur qui interprète le rôle d'Antonio interprète aussi le rôle d'Agnelli, on est face à une performance artistique étonnante qui induirait presque un dédoublement de personnalité de l'acteur lui même, obligé de passer d'un état psychologique à un autre en passant juste parfois par une porte et un léger changement de costume.


Rosa, est l'ex femme d'Antonio. Elle semble être toujours éperdument amoureuse de lui malgré son amertume envers sa trahison. Ce petit bout de femme, petite avec le corps d'une mère, d'une femme d'un âge mature nous apparaît très attachante dès le début, en effet son corps est très expressif: elle gigote dans tous les sens, elle rit, etc. Elle se trouve en opposition totale avec le personnage de Lucia (celle pour qui Antonio a quitté Rosa) qui elle est grande et mince et paraît plus jeune, ce qui représente un peu le cliché des situations actuelles que l'on retrouve dans les films ou les séries populaires: où l'homme quitte sa femme après l'avoir trompée avec une femme plus jeune et plus belle qu'elle. Le personnage de Rosa est aussi un personnage comique mais « sans le vouloir » , effectivement elle croit à ce que lui raconte Lucia et Antonio et, est persuadée que l'homme qui a subit l'accident est son mari, sa naïveté nous fait rire, elle semble être comme une enfant à qui on raconte une histoire.


Lucia quand à elle, est un personnage qui du début à la fin de la pièce semble être le plus réaliste et le plus proche de nous, c'est une femme qui se fait insulter mais qui ne réagit pas, qui affirme ses opinions politiques et qui est en même temps la plus neutre dans la pièce, elle semble être la seule à garder la tête sur les épaules malgré le désordre environnant et l'agitation qui l'entoure. Elle n'intervient pas énormément dans la pièce et pourtant ses apparitions sont essentielles car elles permettent au spectateur de souffler. L'actrice qui joue le rôle de Lucia joue également le rôle de la juge qui elle au contraire est un personnage déformé (elle porte un masque qui lui allonge le nez et la rend ridicule dés son entrée sur scène), c'est un personnage qui n'intervient pratiquement pas dans la pièce mais qui cependant est un personnage extrêmement comique, qui laisse apparaître derrière son aspect de femme rigide et sévère une femme peut être frivole et extravagante peut être même à l'image de la chirurgienne.


Le personnage du médecin, est un personnage témoin de la dénonciation du monde plastique et superficiel dans lequel on vit. Elle porte un masque qui semble uniquement lui déformer le visage ( de loin on pourrait penser que c'est son vrai visage) et lui donne un côté refait et pas naturel, de plus son maquillage reste assez extravagant (rouge à lèvres rouge...) et parfois elle porte un tailleur rouge avec des chaussures à talons rouges laissant apparaître un décolleté généreux qui ne laisse pas indifférent le commissaire avec qui elle « flirte » à plusieurs reprises et toujours de manière comique et exagérée. Son personnage est très démonstratif dans le corps: elle danse, se place dans des positions improbables pour opérer ses patients, non seulement son corps semble totalement retouché mais son travail aussi semble n'être pas réellement son travail quelque part, c'est à dire que sa manière d'opérer les patients et les exercices qu'elle propose semblent ridicules parfois et ne donnent pas l'impression d'être de vrais exercices médicaux aux effets thérapeutiques, mais plutôt une façon pour elle de meubler le vide et donner l'apparence d'un médecin.


Le commissaire apparaît d'abord comme un personnage « sérieux », en effet quand on le voit entrer en scène il nous donne l'impression d'être « l'homme de la situation » , qu'il va tout résoudre et que tout va revenir dans l'ordre grâce à lui, ce qui lui donne un côté comique car on se rend vite compte qu'en réalité lui non plus ne comprend strictement rien à la situation et qu'il est complètement prisonnier de ce quiproquo infernal. Et bien sur ce sérieux est entièrement brisé par le rapport qu'il entretient avec la chirurgienne. Le comédien qui incarne le rôle du commissaire est lui aussi un comédien qui impose son corps ou plutôt qui a un corps imposant, une carrure et un visage qui m'ont beaucoup rappelé le corps de l'acteur français Gérard Depardieu dans ses débuts d'acteur.


On remarque que dans cette pièce chaque acteur joue plusieurs rôle(tous infirmiers au début, rosa et la chirurgienne jouent aussi des agents de police, Lucia joue également la juge, Antonio joue Agnelli…) ce qui va avec l'ensemble de la scénographie, de la mise en scène et de l'aspect bricolage du spectacle en lui même. Leurs costumes sont aussi contemporains que le texte traduit ( robes, pantalons, bottes...)






Scénographie :




Cette pièce propose une scénographie assez particulière et originale, en effet on remarque dés notre arrivée dans la salle que les coulisses se trouvent sur le plateau à l'arrière de la scène , placées derrière des portes qui semblent délimiter l'espace de jeu et l'espace coulisses sur la scène elle -même. Même si à quelques moments dans la pièce les comédiens se « baladent » sur toute sa surface. La scénographie qui nous est proposée ici se veut simple et sans artifice,en effet le fait de pouvoir accéder aux coulisses est un privilège pour le spectateur qui se sent lui même intégré au spectacle. Voir l'envers du décor témoigne aussi de la sincérité du jeu des acteurs de leur engagement ainsi que de leur entraide les uns par rapports aux autres, car on pouvait voir tout au long du spectacle que même lorsqu'ils ne sont pas sur la scène les comédiens sont en jeu car ils s'aident à vêtir leurs costumes les uns les autres à vue ou alors sont très attentifs a ce qui se passe en avant scène (ce qui fait énormément écho a notre travail de plateau). De plus cette mise en scène pour moi représente l'aspect globale de l'esprit de théâtre en tant qu'art de la parole, du corps et de l'écoute dans le quel avec peu de moyens on peut faire beaucoup, c'est à dire que grâce a cet aménagement de la scène on peut voir comment cette troupe de comédiens travaillent ensemble en tant que comédiens et « avec les moyens du bord ».


Beaucoup des objets placés en coulisses semblent ne pas servir à la pièce,(uniquement en guise de décors) les coulisses m'ont apparues comme une sorte de grand débarra dans lequel on trouve tout et n'importe quoi, un peu comme lorsque l'on fouille son grenier ou son garage et qu'on y retrouve pleins de choses que l'on pensait ne plus avoir besoin ou que l'on trouvait totalement inutiles. C'est un peu comme si ici la troupe avait fouillé ses placards et que des tas d'objets avaient été retrouvés et adaptés au service de la pièce. L'aspect bricolage a été privilégié par rapport à l'aspect superficiel de certains théâtres ou certaines mises en scène, ce qui je trouve, rend cette pièce « bariolée » et farfelue plutôt simple en réalité.


Sur la scène était disposée une grande colonne verte sur laquelle était posée une tête énorme en aluminium dont la fonction m'a semblé au premier abord totalement incompréhensible mais ensuite lorsque Antonio arrive sur la scène on le voit s'adresser directement à la statue ou alors en parler à Lucia sous le nom de Agnelli, on comprend donc ici que cette statue représente le personnage dont on entend parler tout au long de la pièce mais que l'on ne voit jamais réellement puisque les seuls moments où il nous apparaît c'est après son opération et donc avec le visage d'Antonio. On comprend donc l'aspect de cette statue : sa taille serait une représentation de son statut :le grand patron de l'entreprise dans laquelle Antonio travail et sa couleur, la matière dans laquelle elle est faite rappellent le domaine de l'usine industrielle.


Les portes placées sur la scène apparaissent tout d'abord comme les portes d'un hôpital (vertes avec des écrit-os blanc et rouge) puisqu'en effet au commencement de la pièce on se trouve dans la chambre d'hôpital de Agnelli ( faux Antonio...), puis à un certain moment de la pièce ,au moment où les comédiens chantent tous ensemble une chanson en italien ajoutée au texte de Dario Fo, ce qui me semble être une coupure entre deux moments précis de la pièce et aussi un bond radical dans le temps, elles sont retournées et l'on remarque qu'elles changent d'aspect (rouges avec des étagères ou encore une photo d'une équipe de football) et représentent ainsi un tout autre lieu qui est celui de la maison de Rosa, cependant à la toute fin de la pièce, les portes dans la folie des acteurs qui se mettent à danser et à courir un peu partout sur la scène finissent par se mélanger, démontrant ainsi que les espaces eux aussi se mélangent: l'hôpital et la maison de Rosa ne formant plus qu'un: l'intime et le public se mélangent également; le désordre prend place sur la scène.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire