La pièce Dealing with Clair de Martin Crimp raconte l’histoire d’un couple qui essaie de vendre leur maison, cette scène quotidienne n’est alors que très banale cependant c’est en partant d’une situation familière que Crimp va dénoncer une société qui n’est
préoccupée que par le profit qui implique un certaine violence. Dans la mise en scène de Sylvain Maurice cette dénonciation est évoquée et assimilée à une étrangeté à laquelle tous les personnages sont confrontés, nous pouvons alors nous demander : comment représenter un événement quotidien tout en y incorporant du bizarre ? Afin de répondre à cette question, nous traiterons les deux parties suivantes : Une satire sociale ancrée par la violence, et des « monstres contemporains ».
La pièce commence par une vue extérieure qui donne sur l’appartement de Claire, le contraste entre la luminosité de son appartement et l’obscurité de l’espace qui l’entoure qui symbolise la ville est frappant. Le fait que la délimitation de ces deux espaces soit si fort est pour montré la solitude de Claire, cependant ce choix scénographique dénonce également une sorte de mise à distance actuelle où l’on se renferme de plus en plus sur soit -même. La « ville » dénonce également cet
isolement car c’est un espace bruyant alors que celui-ci est vide, ce « dépouillement de population » renforce la bizarrerie de la pièce qui nous installe dès la première scène dans un univers inquiétant et étrange. L’autre espace « vivant » ou plutôt habité de la pièce est la maison de Mike et Liz tout comme l’appartement de Claire, c’est un espaces clos qui semble englobé dans un univers violent qui est caractérisé par le bruit, qui est très fort et très saccadé. Par ailleurs le fait que notre regard donne sur l’intérieur d’un maison donc sur l’intimité des personnages peut faire référence au voyeurisme qui est de plus en plus courant de nos jours notamment à cause des télé réalité, le personnage qui est du même point de vue du spectateur lors de la première scène est celui de James, on apprendra à l’avant dernière scène qui l’était en train de l’observer. Le fait que le spectateur soit assimilé à ce personnage renforce la critique faite par le metteur en scène Sylvain Maurice.Le décor n’est pas le seul élément scénographique qui dénonce la violence de la société, lors de la première scène , une conversation est engagée par le biais d’un téléphone entre Claire et sa mère, ce qui montre que de nos jours afin de communiquer ou entretenir des relations sociales, nous utilisons les technologies (téléphone, ordinateur …) ce qui nous enferme dans une certaine solitude alors que l’utilisation de ces technologies doivent nous permettent de conserver un lien voire d’en créer, ce qui est paradoxal. Lors de la rencontre entre Claire et le couple de Mike et Liz, ils sont très distants par ailleurs il y a de nombreuses répétitions que ce soit dans le langage suite à des bégayements ou hésitations, le langage est alors assimilé à une arme avec laquelle on essaie de convaincre , « les mots sont des pistolets chargés » Parain, ou bien dans les positions du corps car il y aura une symétrie entre deux scènes : une jouée par Mike et Liz et l’autre par Claire et James. Ces répétitions semblent faire référence à une espèce d’habitude que l’homme a pris, suite à des codes que la société impose.
Dans Dealing with Clair, les personnages ont une caractéristique qui leur est propre, comme s’ils étaient des personnages « traditionnels » dans le sens où ils incarnent des valeurs et représentent un statut social habituel, par exemple Claire qui est une femme indépendante, le couple Mike/Liz qui est honnête et sympathique et James qui est un homme aimable et fortuné, cependant celles-ci vont changées tout au long de la pièce.
Claire est un personnage qui habite seule et qui semble être indépendante ce qui montre une sorte de force intérieure. Cependant cette « puissance » va être dépassée par ses propres problèmes ( la cigarette, la situation difficile qu’elle entretient avec sa mère) et plus précisément par James suite à ses nombreuses visites. Une certaine familiarité va alors s’installée entre eux, ce qui causera la perte de Claire car elle réduira ses distances vis-à-vis de lui et baissera sa garde.
James, est un homme fortuné et marié, il est alors le symbole d’une certaine réussite sociale. Le fait qu’il soit sociable et mette à l’aise Claire, lui donne la fonction d’une certaine invitation à l’évasion, au voyage et au rêve. Cependant ces visites régulières et répétées peuvent faire penser à un animal tournant autour de sa proie, se préparant à bondir sur celle-ci. Au fil de la pièce sa véritable nature qui est celle d’un être dérangé et effrayant va être révélée, notamment dans la scène où on le voit reproduire la première scène de la pièce (où Claire était au téléphone avec sa mère) il est au téléphone avec la mère de Claire et hurle le prénom de celle-ci. Ces cris et hurlements nous permettent de voir son vrai visage qui est celui d’un psychopathe, obsédé par Claire.
Le couple Mike/liz est un couple traditionnel et parents d’un enfant, et ont engagé une fille au paire afin de s’occuper de celui-ci. Au premier abord, ils représentent une famille plus ou moins idyllique du point de vue de la société et ne veulent pas profiter voire arnaquer les prochains acheteurs de la maison suite à la hausse des prix dans le domaine de l’immobilier. Leur déchéance va entrée en scène lorsque l’on apprend qu’Anna, leur jeune fille au paire vit dans une chambre où il n’y a aucune fenêtre ( on peut alors parler d’une exploitation), leur côté calculateur et profiteur est également mis en avant lorsqu’au final ils préfèrent profiter de la hausse des prix.
Ces personnages qui sont dès le départ représentés comme des personnages conventionnels auxquels des spectateurs peuvent s’assimiler, vont vite sous le poids de l’étrange dévoiler leur facettes cachées que tout être veut dissimuler. Suite à leur défauts qui sont évoquées avec une intensité démesurée, on peut alors parler de ces personnages comme des « monstres contemporains » tout d’abord à cause de leur cruauté, car ils sont censés faire réagir le spectateur suite à leur similitudes. Si cette « révélation » est possible c’est parce qu’ils sont confrontés à leur détériorisation intérieure qui prendra de plus en plus d’ampleur tout au long de la pièce.
En conclusion, dans la pièce Dealing with Clair, la société est assimilée à un univers écrasant de par sa cruauté et de par sa bizarrerie qui touche les personnages au point de leur faire endosser un statut inquiétant comme celui du personnage de James. Par ailleurs, le fait que
Sylvain Maurice fasse bouger la maison dans divers sens ( de biais, en avant, en arrière, …) fait directement référence aux spectateurs, car suite à la déchéance des personnages celle-ci change de point de vue les concernant, ce qui est caractérisé par la maison qui bouge et que l’on voit sous différents angles de vue.
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