lundi 10 janvier 2011

Peindre et créer son visage : Clytemnestre troublante








Mes premières idées de maquillage




Interprétant la Clytemnestre caressante après le retour d'Agamemnon avec Anas, Charlène et Elodie, j'écris cet article pour nous aider à trouver un premier maquillage type, mais aussi un jeu, un état d'esprit qui transparait aussi bien sur nos visages que sur nos corps et nos voix.
Au retour d'Agamemnon, après dix ans d'absence, Clytemnestre se doit de représenter dignement son mari, d'être à la hauteur de ses attentes et celles du peuple d'Argos à savoir : une femme fidèle, sage, digne, qui gère les affaires de la maison avec discrétion. Une épouse modèle. En parlant jeudi dernier du maquillage de la femme nouvellement mariée dans le folklore hindou, c'était très judicieux car traditionnellement, la virginité du moins la pureté était quelque chose de primordial lors du mariage (aussi bien en Inde qu'en Europe il n'y a pas si longtemps) et l'arrivée d'Agamemnon après tant d'années, s'en
sortant "victorieux" des charniers de Troie, est une deuxième naissance pour lui, et leurs retrouvailles prennent des allures de renouvellement des noces. Clytemnestre se doit d'apparaître aussi aimante qu'au premier jour de leurs noces, accueillant l'époux avec respect, son amour intact, dévouée.

La Médée de Frechuret qu'on a été voir, enjôleuse avec Jason mais les germes de son crime dans le coeur, pleine de rancune.





Image extraite du film Une vieille maîtresse de Catherine Breillat, adaptation du roman de Barbey d'Aurevilly. Un jeune dandy doit épouser une pure aristocrate mais reste ensorcelé par
une femme de bas étage, la Vellini, dont il est l'amant depuis 10 ans. Ca n'a pas grand chose à voir avec notre histoire mais le jeu d'Asia Argento est trouble et empoisonné, sensuel et maléfique. Ce serait un peu le paroxisme de l'attitude de Clytemnestre.Fu'ad Ait Aattou & Asia Argento dans Une Vieille maîtresse


Comme on le sait, elle se doit de revêtir ce visage irréprochable car il lui garantit l'absence de soupçons de son belliqueux mari ainsi que ceux du Choeur, sage, au fait des traditions qui doivent être respectées et du passé sanglant des Atrides : elle marche sur des oeufs en voulant l'assassiner. C'est pour cela qu'elle redouble d’efforts et cajole le "héros" troyen, déployant les "merveilles brodées" à ses pieds, rampant presque devant lui, toute pleine d'adoration. Mais tout cela sonne faux : Agamemnon est embarrassé par tant d'honneur, déconcerté par cette attitude inattendue. En effet, comme on l'a dit en cours ce matin, son comportement est inconvenant. La seule chose dont elle fait part au Choeur (et seulement au Choeur au départ) c'est l'amertume d'être laissée seule (sic) dans le lit conjugal, d'avoir souffert des rumeurs scabreuses à propos de son époux. Elle se pose en victime, tout en affichant son exultation de manière assez virile, comme on l'a dit. Harrassé de son voyage, il veut retrouver les plaisirs simples de la vie d'homme, et ces grandes pompes le gênent. Malgré un court moment de suspicion, il cède à Clytemnestre, brûlant de s'allonger près de son épouse. Ce doute, il est dû à cette exagération, cette adoration obscène. Dans les gestes, l'expression du visage, la voix, un certain extase doit transparaître mais doit être teinté d'hypocrisie (gestes souples, dansés, félins, comme la panthère rodant autour de sa proie -lieu commun c'est vrai :p-), d'ironie provoquant le malaise : cet amour là a quelque chose de pervers. Tout est à double sens, elle joue avec le feu, et contient son impatience de réaliser enfin sa vengeance, qu'elle nomme sans rougir "Justice". Et cette perversion, Agamemnon doit y succomber, comme le spectateur (ici le Choeur, et il y succombe, effectivement car il ne croit pas la prophétie de Cassandre !).



Exemple de maquillage de femme mariée indienne, ici c'est Paro, l'héroïne du film Devdas, la princesse par excellence. Ici son maquillage est très connoté, mais peut nous servir d'inspiration pour une trace dans les cheveux, certes beaucoup moins esthétique, plus tribale.

Quand Assia a parlé des danses indiennes, je me suis rappelé une scène du film ultra culte Devdas : je vous met une des scènes que je préfère pour les costumes notamment (qui ne sont pas sans rappeler ceux qu'on a vu dans la mise en scène mnouchkinienne). Même si on est partis sur une autre piste pour les costumes, on pourrait imaginer un costume peint et un ajout d'accessoire pour se détacher un peu de l'univers de Novarina tout en restant dedans (un manteau royal pour Agamemnon, une cape, une tiare, une jupe nouée autour de la taille, que sais-je ?). Mais j'aime ce passage pour le regard de Madhuri Dixit qui m'électrise complètement : si vous regardez bien ses yeux sont capables d'exprimer de la joie, de la malice sensuelle, de la mélancolie, de l'amour fou, de la peine... en quelques secondes. L'industrie bollywoodienne forme les acteurs pour qu'ils jouent voire "surjouent" leurs émotions, et dans certains films cette émotion peut paraître vraiment fake, mais ici je trouve ça saisissant. Je pense qu'on pourrait prendre de la graine de cette actrice, car si je ne m'abuse, Clytemnestre joue un double jeu, et doit elle aussi exprimer des émotions contraires à ses états d'esprit pour maquiller son crime. Je ne sais pas si mon exemple est pertinent, et s'il vous parlera.


Alors les Clytemnestre, usons (et surtout abusons) de nos charmes !

2 commentaires:

  1. Contribution très pertinente et bien faite, Margot ! (Avec presque pas de fautes d'orthographe ne plus : un vrai luxe ! Sans blague, faudra nettoyer vos messages les filles, parce qu'ils sont généralement truffés de fautes et ça fait vraiment mauvais genre pour des TL...)
    Juste deux trois rectifications parce qu'il est toujours primordial avant de poser un parti pris de revenir au texte et d'en faire une lecture très serrée, inattaquable :
    - parfaitement d'accord avec l'idée d'une Clytemnestre voulant faire bonne impression vis à vis d'Aga et du Choeur et jouant le rôle de l'épouse modèle, mais : elle dévoile aussi crûment ses histoires amoureuses, les tromperies de guerrier d'Aga et peut-être son propre comportement d'épouse délaissée (en termes cryptés, mais l'image des lacets dénoués est érotique) : en tout cas jouer la comédie ici en revient pas tout à fait à jouer la vierge effarouchée ! Elle l'invite au contraire à un bain délassant et érotique (comme Ulysse accueilli par Nausicaa, remember)
    - "Agamemnon le sent bien" : non, je ne crois pas...; le ballot ne comprend rien au contraire. Il trouve juste l'attitude de Clytemnestre étrange, inadaptée, sur le plan du droit, des dieux, mais ne décèle en rien la machination ! ( au fait : "Harassé")
    Mais Clytemnestre perverse, entamant une danse d'amour qui est en fait danse de mort, usant de tous ses charmes et de ceux de son discours, embobinant le Choeur, Agamemnon et le spectateur en comédienne sûre de ses effets, ça oui, alors, trois fois oui !
    Vivement jeudi.

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  2. j'avais pensé aussi au trait rouge dans les cheveux que l'on appel le sindoor. Le sindoor est une poudre rouge que le mari applique dans la raie de cheveux de son épouse lors de la cérémonie nuptiale indienne et que l'épouse se doit de porter tous les jours suivants le mariage, pour témoigner à Dieu et aux autres personnes de son statut d'épouse. J'avais l'intention de publier un article dessus mais margot m'a devancé ^^ tant pis je ne vais faire qu'ajouter quelques connaissances en esperant que cela vous sera utile. Clytemnestre reprend sa place d'épouse à l'arrivée d'Agamemnon c'est pourquoi j'ai pensé au sindoor, je l'imaginais parfaitement appliquer cette "poudre" (en peinture) pour masquer sa trahison et apparaître comme le disait Margot comme l'épouse modèle qui avait attendu le retour de son époux avec impatience et fidélité. De plus l'image d'une Clytemenestre qui arrive toute sanguinolante au moment des cadavres m'a rappelé que cette poudre est enlevée par la main du père de la mariée lorsqu'elle devient veuve et qu'à ce geste elle s'éparpille sur le visage comme le sang dégoulinerait sur le visage de Clytemnestre. Il est vrai que cela peut faire légèrement conoté dans la tragédie que nous nous devons présenter c'est pourquoi, moi je n'avais pas penser directement à l'application de ce trait rouge mais tout simplement au fait que le maquillage se fait au niveau de la racine des cheveux, ( car le sindoor peut etre appliqué uniquement sur une petite racine en haut du front ).C'est aussi une poudre qui rappel la joie car elle est utilisée en inde lors de la célèbre fête du holi,qui n'est autre que le travail que nous présentons : les gens s'habillent de blanc sortent dans la rue et s'enpoudrent les uns les autres de poudre de couleurs différentes et vives, dans la joie et la bonne humeur ce qui m'a beaucoup rappelé notre travail sur Novarina depuis le début de l'année.

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