Nous en sommes aujourd’hui à la troisième séance et nous commençons vraiment à apprivoiser le travail à venir. Comme à chaque séance nous avons commencé par faire un récapitulatif de la séance précédente où nous avons échangé nos avis et impressions afin de commencer cette séance en accord avec la dernière.
Nous avons principalement parlé du texte de L’Acte Inconnu de V. Novarina et les éléments principaux qui sont ressortis de la discussion sont les suivants :
- Nous trouvons cette œuvre particulièrement « incompréhensible », du moins pas aussi traditionnelle qu’une autre pièce de théâtre, et cela est notamment dû au langage choisi par l’auteur, soit le "novarinien" qui regroupe un grand nombre de néologismes. Cette langue à pour autre caractéristique le fait qu’elle est en fait une agglomération, une juxtaposition de mots sans connexion logique.
- Nous nous retrouvons donc face à une œuvre complexe à adapter du fait qu’elle n’ait ni intrigue, ni réelle histoire. Elle se contente de traiter de thèmes, de sujets, regroupés. De plus, nous avons fait ressortir le fait qu’il n’y a pas vraiment de « personnages » au sens propre, nous les avons donc qualifiés de « créatures » ce qui leur correspondait mieux selon nous.
- Des questions se sont donc posées à nous, à propos de l’approche que nous allions pouvoir faire de l’œuvre et de l’adaptation que nous allions pouvoir tenter. Comment apprivoiser et comment jouer cette pièce ? Comme réussir à s’approprier ce théâtre verbal formé de paroles juxtaposées ? Comment établir l’aspect visuel par rapport au texte : c’est à dire comment transformer le théâtre de la parole en représentation ? Les enjeux de la séance se sont donc orientés vers ces problématiques et nous avons travaillé dessus par la suite.
La fin de la première heure à consisté en un exercice particulièrement difficile. Nous avons tout d’abord commencé par de la « sillywalks » qui est extrait de sketchs des Monty Pythons et qui consiste à inventer une démarche la plus déformée et étrange possible. Cela nous a permis d’avoir une première approche du « bizarre » et d’inventer un mouvement qui, peut-être, pourrait servir d’accompagnement, ou encore de « représentation » au texte de Novarina. Puis nous avons eu à nous glisser dans la peau de différents animaux, toujours dans la même optique à mon avis, nous avons eu à nous transformer en poule, en chien et en poisson. Cela nous forçait à nous abandonner totalement, à ne pas être dans l’imitation mais dans le personnage de l’animal en question. Cela nous aide à préparer l’aspect étrange et biscornu, parfois très animal du texte de L’Acte Inconnu puisque nous allons devoir l’aborder de manière bête et élémentaire.
Durant la seconde heure nous sommes passées les unes après les autres sur le plateau et avons récité un extrait du texte propre à chacune. Nous devions nous positionner dans le texte, à l’intérieur de celui-ci, sans tenter de le comprendre, sans le juger. Juste le réciter avec profondeur et concentration en s’imprégnant au maximum de la ponctuation et du rythme. Sans interpréter nous nous sommes amusés à accompagner le texte de mouvements très étranges en utilisant un objet sorti de tout contexte, comme un tabouret par exemple. Le professeur s’est prêté à la démonstration sur quasiment chacune des interventions et le résultat (très drôle) nous a menées à une approche plus large et moins focalisée sur les mots. Nous avons réussi à nous détacher de l’obsession et la difficulté du texte pour avancer sur le terrain de l’interprétation.
C’est exactement ce sur quoi nous avons poursuivi la séance, nous sommes passées dans l’ordre de nos extraits, et avons présenté nos textes comme si nous étions des "machines à parole". En fond, quelques élèves devaient accompagner le texte de mouvements. Nous avons eu à ce moment là la véritable occasion de lier le mouvement corporel au texte, en groupe. C'était particulièrement intéressant d'être en improvisation sur quelque chose que l'on ne comprenait pas forcément. C'est d'ailleurs ce qui à motivé la séance de A à Z, je veux dire par là que nous avons passé trois heures à improviser, à se lancer dans un jeu de plateau sur des supports textuels ou sur des sujets inconnus, ou encore incompréhensibles. La confiance que le groupe a acquis nous permet d'avancer de façon très intéressante. Je pense même que cette séance est parvenue à nous rassurer sur la pièce, qui nous paraissait quelque peu inabordable auparavant.
Jane Roussel.