lundi 31 janvier 2011

DEVOIR SURVEILLE AGAMEMNON


Pssssstttt !
J'ai oublié de vous le rappeler :
1) Mercredi, de 9h30 à 13h00, il y a un DS sur Agamemnon dans les conditions du bac
2) Il faut que l'une d'entre vous vienne chercher les sujets au CDI à 9h25 avant que vous vous rendiez en salle 326
3) Apportez vos textes et vos brochures Agamemnon : ils sont indispensables pour traiter convenablement le sujet et pour analyser certains documents iconographiques.


Masque dit d'Agamemnon

samedi 29 janvier 2011

TROMBINOSCOPE Point technique

Vous l'avez peut-être remarqué, mais deux nouvelles pages ont été récemment publiées = pour y accéder il faut cliquer sur leur intitulé en haut à droite de la page d'accueil.
La première s'intitule "Comment ça marche ?" : elle est surtout destinée aux visiteurs occasionnels ou au jury pour expliquer l'objet et le fonctionnement du blog (et notamment les différentes navigations possibles via les libellés : par rubriques, par élève, par oeuvre, etc.)
La seconde s'intitule "Trombinoscope" : elle est encore vierge.
C'est à vous de la remplir.
L'idée est que chacune y publie un message où elle se présente, explique sa relation à l'option théâtre et au théâtre en général, donne un aperçu de sa personnalité et renseigne le jury sur sa place dans le travail collectif (rôles, postes assumés, etc). Le tout accompagné d'une jolie photo (comme celle jointe...) où vous êtes reconnaissable (pour aider le jury à vous identifier le jour du bac.. on me reconnaît bien, là, non ?).
A vous de jouer !


jeudi 27 janvier 2011

JDB du 27/01/2011

Comme à notre habitude, nous avons commencé notre séance en parlant de ce que nous avons fait la séance précédente, et cette fois-ci nous avons directement abordé ce sur quoi nous allions travailler pendant toute la séance. Dans un premier temps, nous nous sommes interrogés sur la question de comment commencer notre représentation? Ainsi plusieurs possibilités ont été mises sur le plateau afin d'essayer de trouver la meilleure des réponses possibles. Plusieurs d'entre nous ont proposé des débuts, tous aussi différents les uns que les autres: en effet, ce qui s'est tout de suite dit, c'est que nous commencerions avec les Émissaires dans Agamemnon. Nous avons donc ensuite cherché à savoir comment les faire rentrer (Valentine et Laurine donc), et quand, comment entrent les "ouvriers du drame" par la suite. Plusieurs propositions ont été faites, mais celle que nous avons retenu pour l'instant est la suivante: Laurine et Valentine entrent sur scène, puis un petit groupe rentre à son tour pour laver et habiller les émissaires. Le fait de les laver est comme un rituel religieux où elle seraient purifiées de tous les sacrifices, tous les malheurs dont elles ont souffert. Ce serait donc une purification de l'âme et du corps qui leur permettrait de passer des "revenants de la guerre" à des "ouvriers du drame" par la même occasion. Enfin, un dernier petit groupe s'occuperait d'installer le matériel pour Novarina.
La deuxième heure nous avons toute de suite commencé la pratique avec les Emissaires. Les filles ont donc joué et nous ont montré une mise en scène particulière: elles entrent par le rideau de derrière, dans le même pull pour ne former que « un » personnage. Puis Laurine est sur le dos de Valentine, ce qui a pour effet de créer une image de monstre à deux têtes. C’est une entrée royale et très intéressante. Cependant comme je l’ai dis, je ne sais pas si l’idée d’être toutes les deux dans le même pull a un vrai sens. Pour moi lorsqu’elles jouaient côte à côte leur donnait plus d’ampleur dans le jeu et de présence. Le système avec le pull est assez impressionnant et marche assez bien, mais l’idée d'une figure monstrueuse, devient pour moi presque hors sujet. Les émissaires sont deux personnes qui reviennent de la guerre, qui sont fatigués et qui ont beaucoup souffert. L’entrée me paraît excellente parce que comme nous l’avons dit, elles portent sur elles un poids très lourd, celui de revenir de la guerre. Mais rester dans le même pull tout le long n’est pas très nécessaire pour moi. Elles pourraient peut-être l’avoir pour le début, pour former ce poids mais ensuite le retirer afin de dire leur texte. Cela donnerait plus d’impact à mon goût.
Nous avions dit qu’il serait bien si deux d’entre nous les déshabillait pendant qu’elles disent leur texte. Nous avions convenu que ce serait vers la fin de leur texte. Personnellement, je pense qu'il serait mieux de leur enlever le pull en début du texte, afin qu’elles ne soient pas un « monstre à deux têtes » tout au long de leur scène. C’est donc Cynthia et moi-même qui devons nous occuper de les déshabiller, puis de les rhabiller. Nous avons également dit que c’est lorsque Valentine dit « Faite lui fête » qu’il y aurait quatre ouvriers du drame : Clémence, Alice, Charlène et Marine qui entrent sur scène et commencent à installer la bâche.
Puis entre ensuite un autre groupe d’ouvriers du drame qui sont: Assia, Camille, Anastasia et Jane avec le drap blanc. Une fois tout le matériel installé chacune va chercher sa bassine pour commencer le « rituel sacré » qui est celui de se laver les pieds.
Ensuite la deuxième heure nous avons vu le passage des Clytemnestre, avant le meurtre. Leur proposition était à peu près la même que la semaine dernière, elles ont juste rajouté le maquillage qui leur donnait plus de puissance et qui les aidait, je pense, à plus entrer dans leurs personnages. Leur idée de mise en scène est très intéressante parce qu’elles prennent à témoin tout le monde. En effet devant elles il y a un petit groupe en forme d’arc qui représente le chœur. Nous sommes donc touchés d’avance par leurs paroles. D’autre part, elles avaient toutes des maquillages différents: elles avaient mit du rouge sur des parties différentes de leur visage pour chacune, cependant je pense qu’il serait mieux si toutes les quatre ont du maquillage (donc de la peinture) sur la même partie du visage. Cela montrerait bien qu’elles ne sont qu’un personnage: Clytemnestre. Même si elles veulent montrer les différentes « facettes » de ce personnages, je pense qu’il serait mieux d’avoir les mêmes parties du visage maquillées pour toutes, sans doute cela aiderait à la compréhension pour nos spectateurs.
Enfin nous avons terminé en regardant le passage de Cassandre. En comparaison avec la séance précédente les filles ont changé la mise en scène mais pas assez pour qu’il y ait quelque chose de surprenant et de marquant. En effet, elles étaient toutes regroupées et lorsqu’une d’entre elles devait dire son texte, une autre devait la tenir afin de garder toujours le contact et de montrer que c’est un envoûtement, une vision. Également, cette fois-ci elles ont ajouté un petit texte en fond qui n’est autre que le début de « Una fortiva lacrima » pour montrer que ce n’est pas son état réel, Cassandre est envoûtée, sous l’emprise d’une vision. C’est donc intéressant de montrer qu’elles ont été comme « ensorcelées », on comprend bien que Cassandre et en transe et face à sa vision. Cependant, je pense que le fait qu’elles soient toute en groupe, dans la même position et dans les mêmes gestuelles ne correspond pas au personnage de Cassandre. Je pense, que ce serait peut-être mieux si elles étaient séparées, et que lorsque l’une d’entre elles doit dire quelque chose alors les autres accourent vers elle pour savoir ce qu’elle va dire. Tout en continuant à chanter, à murmurer leur chanson envoûtante. Pour moi cela aurait plus d’impact et le public serait sans cesse surprit de savoir laquelle d’entre elles va parler, ce qui va se passer, etc. De plus, il y aura un peu plus d’animation sur le plateau, ce qui pourrait par exemple former la métaphore du cerveau et des pensées de Cassandre: tout est confus pour elle, elle est en transe et voit des choses. La « panique » sur le plateau pourrait donc donner un aspect inquiétant et surprenant. C’est comme cela que je verrai la mise en scène du passage de Cassandre.
Nataly

mercredi 26 janvier 2011

Recherches pour Cassandre



Après avoir parler un petit peu parler du cas sordide de Cassandre, nous sommes convenues d'une approche de costume. En restant dans quelque chose d'assez simple afin de ne pas étouffer la personne qui joue son rôle.

La longue
jupe Noire évasée. Noir comme le corbeau, car le corbeau est toujours signe de mauvais présages, le cri du corbeau très désagréable fait penser au cri que pousse Cassandre lors de ses transes. Dans notre idée du rituel incantatoire le mouvement de la jupe appui l'aspect danser du rituel. Tout en adéquation avec le contexte historique car nous avons supprimé le chœur dansant, mais Cassandre comme nous l'avons vu mercredi 26janvier établie un lien verticale au niveau de la tragédie puisqu'elle est la porte-parole des dieux et la porte parole du passé et des crimes commis. Le rapport avec le chœur est que lui aussi détient ce rôle de liens entre le proskenion et les spectateurs.

Le haut beige, couleur peau. Cassandre est une
Barbare, étrangère venue d'ailleurs, une esclave sexuel au service d'Agamemnon. Le haut donne l'illusion d'une semi-nudité. Cassandre déchue de son statut royale, réduite à l'esclavage, se retrouve dans une certaine honte du à ce à quoi on la réduite, la nudité peut évoquer une honte. Cela marque aussi son appartenance physique à Agamemnon. Nue comme déposséder, montrée, le trophée de guerre exhibé.

Les cheveux tirés (plaqués) en arrière. Il est évident que nous ne pouvons pas avoir les cheveux devant le visage, les cheveux sont ici plaqué avec de la peinture (noire). Les cheveux ne sont pas ordonnés, au contraire l'aspect sale rentre en compte et il est certain que Cassandre bafouée, prisonnière, malheureuse ne va pas se soucier de ses cheveux. La chevelure détachée, désordonnée mime ce qu'il se passe dans sa tête (la forme mimi le fond).

Les mains sont noires car nous nous maquillons à vue avec celles ci. Les gestes de la main généralement sont amicaux (salutations, serrer la main, tactile etc.)... Ici la main noir peut avoir beaucoup de symbolique d'abord toujours le noir couleur du deuil, du malheur, des ténèbres.
Aussi le noir couleur négative ici montre comme une annulation du pouvoir d'action de la main. Cassandre
impuissante face à son destin. L'action résultant de ses mains est le noir, le néant, la mort. En effet tout ce que Cassandre entreprend pour échapper à son destin l'y replonge et le fait arriver encore plus vite.

Les mains et le cou.
Enchainés ici avec de la peinture ... noire =). Cela renvoi d'une part à sa malédiction à laquelle elle est enchainée, à son statut de prisonnière, et en général à la condition humaine enchainée au destin que lui choisissent les dieux, Cassandre étant la seule dans Agamemnon à ne pas se laisser tenter par le pécher d'ubris et donc à ne pas se hisser au dessus de sa condition de mortel.
On s'était dit de garder l'aspect sale en noircissant les membres de Cassandre, montrant son voyage, salie par Agamemnon, la cendre de Troie (Cassandre, la cendre... coïncidence ?).


lundi 24 janvier 2011

Une carte à mémoriser

Voici le travail de Valentine : la carte que chacune doit avoir en tête avant d'arpenter le plateau novarinien.
A afficher en 4x3 m au-dessus de son lit !


jeudi 20 janvier 2011

Journal de Bord du 20 Janvier 2011

Durant la première heure de cette 16ème séance, nous avons échangés nos avis sur la dernière pièce de théâtre auquel nous avons assistés la veille : Ithaque. Nous avons pu constater que le chœur était plus un dispositif de choral plutôt qu’un chœur classique mais aussi que les trois femmes qui le représentait travaillaient plus sur l’unité. Plusieurs d’entres nous ont appréciés les partis pris du metteur en scène comme par exemple sa modernité ou son côté épuré et froid contrairement à d’autres, comme moi , qui n’ont pas apprécié la comédienne qui jouait Pénélope, à cause de son accent ou de sa façon d’aborder le personnage, par exemple. Ce moment était assez intéressant dans le sens où j’ai remarqué que ce spectacle avait provoqué de nombreuses réactions au sein du groupe, ce qui apportait un véritable moment de discussion entre nous. Puis, nous avons abordé les idées que nous avions eu au cours de la semaine et grâce à la représentation que nous avions vu, afin d’enrichir notre travail sur Agamemnon, en phase de « construction ». En effet, pour représenter Clytemnestre, l’une d’entre nous, a eu l’idée, tout en respectant nos propres parti-pris, à savoir : la mise à vue et la peinture, élément essentiel dans notre projet, de mettre en avant le personnage en lui faisant une tâche de peinture sur le visage, cette tâche représenterait une partie du corps. J’ai trouvé que c’était une idée intéressante car cela pourrait clairement démarquer Clytemnestre des autres protagonistes d’Agamemnon tout en lui donnant une importance et une signification particulière. De plus, Jane nous a exposé une de ces idées concernant le costume de Cassandre et Clytemnestre qui m’a beaucoup plu : Toutes les représenter par une longue robe rouge ou noir. C’est, à l’origine, une idée qui m’était venu à l’esprit, parce qu’en lisant l’œuvre, je m’étais toujours clairement imaginé ces deux femmes habillées par de longues robes aux couleurs représentatives de leur fonctions dans l’histoire. De longues robes pour mettre en avant leur féminité et pour se fondre dans le contexte historique du récit. Ensuite, nous avons parlé de certaines pistes de maquillage, notamment pour Cassandre, Assia nous a fait part de son idée de « peinturlurer » outrageusement les yeux de Cassandre pour mettre en valeur son statut de prophétesse. Le maquillage doit être en quelque sorte le pilier central de notre projet. La peinture doit nous habiller. En résumé, nous devons laisser parler notre imaginaire pour mieux donner naissance à un projet des plus excitants. J’ai beaucoup apprécié les idées donner par chacune et je pense sincèrement que le résultat de notre travail sera remarquable, tant par les recherches faites à partir de la peinture que par les éléments apportés pour les costumes.


Camille



Pendant les deux dernières heures, nous avons travaillé sur Agamemnon. Tout d’abord, Laurine et Valentine ont travaillé sur leur rôle de l’Emissaire. Elles ont fait une belle entrée, elles apportaient beaucoup d’émotion et la ponctuation ainsi que les silences étaient parfaitement respectés. Le fait qu’elles soient côte à côte les renforçait. Plusieurs idées ont été suggérées au niveau de la scénographie. En effet, dans leurs personnages, on recherche l’unité et on veut accentuer le côté siamois. Pour cela, quelques idées ont été proposées comme celle d’être dos à dos pour pouvoir avoir une bouche avec deux corps. Cela permet d’insister sur le fait que ces deux corps ont tous les deux la même pensée. Pour Cassandre, les filles s’étaient regroupées en une boule humaine pour insister sur l’unité et l’étrangeté du personnage de Cassandre. De plus, la boule humaine respirait et rappelait la transe et la folie de Cassandre. Cette proposition était intéressante, cependant les cheveux devant les yeux est un élément à supprimer. Morgane nous a fait une très belle prestation. En effet, elle vivait complètement son texte et nous avions vraiment l’impression d’avoir Cassandre en face de nous. Son corps semblait être transcendé, comme si elle avait des visions et parfois elle poussait des petits hurlements. La folie de Cassandre et son côté prophétesse était omniprésent lors de sa prestation. Puis, nous avons vu Clytemnestre après la mort d’Agamemnon et de Cassandre. Les deux corps étaient entassés sur une table avec une nappe rouge. Cette nappe rouge rappelait à la fois le meurtre, le sang et la rage de Clytemnestre ce qui était intéressant. Cependant, le mieux serait de faire apparaitre qu’une partie du corps. Ensuite, les filles jouant Clytemnestre étaient regroupées derrière la table, les mains sur les corps. Cela montrait leur fierté et leur assurance vis-à-vis de ce meurtre.


Anastasia


Ayant joué dans cet épisode, je peux dire que j’ai été quelque peu submergée par l’émotion en récitant le texte qui m’avait été attribué. Les mots étaient si forts et si poignants qu’ils m’ont pris aux tripes, je vivais les paroles de Clytemnestre, je ressentais sa haine et son chagrin, sa fierté et sa vengeance. C’était la toute première fois que j’interprétais le personnage de Clytemnestre sur le plateau et j’ai été moi-même surprise d’avoir tout de suite été en quelque sorte « envoûtée » par mon texte.


Camille



Enfin, nous allons terminer sur l’épisode de Clytemnestre au retour d’Agamemnon, dont je faisait partie : Nous sommes entrées chacune par une partie de rideau pour montrer les différentes Clytemnestre et pour insister sur son assurance. Puis chacune a dit son texte d’une façon claire, avec des gestes et en respectant à la fois la ponctuation et la respiration. Le chœur était en arc de cercle devant nous laissant une ouverture au milieu. Au début, nous nous adressions au chœur d’une façon soutenue et parfois violente. Puis, au moment où Charlène s’est adressée à Agamemnon (« descends de ce char »), nous sommes sortis de l’arc de cercle (le chœur), pour nous adresser directement à Agamemnon. Le changement de facette de Clytemnestre s’est tous de suite fait. Elle était douce et séduisante. Enfin, le chœur a détaché nos jupes rouges et les ont étalées pour faire le chemin conduisant Agamemnon au palais (rouge = rappelle son sort, c'est-à-dire la mort).



Par rapport à la semaine dernière, j’ai enfin trouvé ma place dans le texte. En effet, au début j’ai eu beaucoup de mal à cerner les paroles de Clytemnestre. De plus, je n’arrivais pas à réciter mon texte avec la ponctuation et la respiration. Lors de cette séance, j’ai pris beaucoup d’assurance et je me suis imprégner du texte. Je le disais d’une manière simple et directe. J’étais comme posséder par le personnage de Clytemnestre et sa pensée était ma pensée. Je ressentais sa haine et la vengeance qu’elle voulait accomplir. C’était une impression surprenante mais rassurante car j’ai compris la difficulté première de ce travail. Cependant, je dois soutenir mon regard vis-à-vis du spectateur. Pour réussir cette difficulté que j’ai eu avec le texte à la séance précédente, j’ai beaucoup travaillé l’articulation. De plus, j’ai relus, mastiqué et récité mon texte avec la ponctuation et en respirant. Dés que je ne respirais pas assez, je recommençais. Enfin, pour exécuter le langage en même temps d’interpréter le mouvement et l’avis d’une pensée, il faut cerner la parole du personnage. Pour cela j’ai repris les vers et je les ais interprété (pourquoi dit-elle cela ? qu’est ce que cela veut dire ?...). Lorsqu’on comprend l’enjeu de ses paroles et sa pensée, nous pouvons enfin faire place à notre propre interprétation de Clytemnestre.


Anastasia.





mercredi 19 janvier 2011

Extrait d'Analyse- Ithaque, de Botho Strauss, mis en scène par Jean-louis Martinelli.

Jean-Louis Martinelli met en scène Ithaque, écrit par l’auteur dramatique Botho Strauss. Ithaque est en fait une reprise des chants du retour d’Ulysse en sa terre, de l’Odyssée d’Homère. En effet Botho Strauss retrace à travers son texte l’arrivée d’Ulysse à Ithaque et sa reconquête du pouvoir, tout en apportant une dimension contemporaine au texte mythique et originel qu’est celui d’Homère. Ithaque est donc une pièce qui d’emblée oscille entre le VIIIème siècle avant J.C et aujourd’hui. En un sens Strauss s’appuie sur le texte fondateur de l’Odyssée pour créer ce qui serait une fiction ou une actualisation de cette œuvre, et de ce texte mythique. Il donne également à voir un autre aspect du personnage d’Ulysse, qui est celui du personnage « théâtral » ; Ulysse comédien, maître de la ruse et du déguisement. Ainsi nous pouvons nous demander comment Martinelli met-il en scène ce texte de Strauss, comment l’interprète t-il (quels aspects fait-il ressortir) et surtout comment gère t-il la tension antique/contemporain ?

On voit que dans sa mise en scène Martinelli a beaucoup travaillé sur la dimension onirique de l’œuvre, n’oubliant pas tout le côté fantastique de l’Odyssée, et laissant apparaître sous formes d’indices des éléments contemporains à l’antiquité grecque : comme par exemple le dispositif scénographique. En effet, on peut décomposer l’espace scénographique en trois étages correspondant aux trois étages qui composaient l’espace de jeu des comédiens dans le théâtre antique. A l’avant scène, juste devant les spectateurs se trouve une marre d’eau, synonyme du rivage, par laquelle Ulysse arrive sur la terre d’Ithaque, puis se trouve la cour du palais avec les prétendants et les villageois (porcher et Ulysse lorsqu’il est en mendiant). Enfin des escaliers monumentaux structurent l’espace : en haut de ses escaliers se trouve la chambre de Pénélope, ses appartements et le lit conjugal. C’est le proscenium (proskenion), qui va d’ailleurs se révéler mobile dans l’une des scènes de la pièce, où Pénélope va ordonner aux prétendants de cesser de comploter contre son fils. De plus de grandes colonnes formant les murs du palais, et délimitant l’espace rappelle avec sans difficulté l’architecture de la Grèce antique. Martinelli donne dans le spectaculaire, et chercher à faire marcher l’imaginaire du spectateur. Il met en place une dimension onirique très forte dans sa mise en scène, faisant écho avec les images poétiques et les figures homériques. L’Odyssée est en effet un voyage qui conduit Ulysse dans des terres inconnues et imaginaires : c’est avant tout un mythe. Ainsi la scène de retrouvaille entre Ulysse et Télémaque est une scène présentée comme onirique : Ulysse apparaît à Télémaque comme un héros, un guerrier à la limite du divin, un oracle. Ulysse est vêtu d’une armure en or scintillante et d’un casque de guerrier. Il apparaît comme fort et puissant aux yeux de Télémaque et du spectateur. Télémaque croit en effet rêver lorsqu’il retrouve enfin son père perdu depuis toutes ses années. De plus la dimension onirique se retrouve notamment à travers trois personnages, ou plutôt trois figures, trois femmes présentes sur scène et imaginées par Botho Strauss. Ces trois femmes se définissent tout d’abord par une partie du corps, à chacune d’elle correspond une articulation du corps : le genou, la clavicule et le poignet. Martinelli pour représenter cela à donc recouvert chacune de ces articulations des comédiennes d’une sorte de bijou en acier. On peut alors penser que ces femmes sont complémentaires, qu’elles ne font qu’un. Elles s’apparenteraient alors à un chœur. Leur fonction principale et la plus évidente est effectivement de commenter les évènements qui se déroulent sur scène, sous leurs yeux, notamment lors de la scène du massacre. Le massacre est caché aux spectateurs par un immense rideau de mailles en acier, sur lequel se reflète l’eau. Les trois jeunes femmes alors vêtues de longues robes noires se mettent en avant de la scène au centre (soit entre l’eau et les spectateurs). S’adressant directement au public, elles rapportent les faits et les horreurs du massacre, qui est sensé être entrain de se dérouler derrière le rideau. Ainsi Martinelli en appelle à l’imagination du spectateur. Les femmes, dont la place et le rôle est assez complexe à définir, sont notamment très proche du spectateur à cet instant. Ces trois commentatrices sont les seules à côtoyer tous les personnages, allant d’un étage à un autre. Elle forme une unité à la fois dans ce qu’elle représente, en ne formant qu’un seul et même corps, mais également dans leur jeu. Elles apportent en effet une dimension lyrique à la mise en scène. Leurs voix se mêlent et leurs partitions de texte s’enchaînent dans une telle fluidité que leurs voix n’en forment au final plus qu’une. Elles interviennent notamment auprès de Pénélope, vêtues de robes blanches, comme si elles étaient des servantes envoyées par Athéna. De même ce sont elles qui vêtissent Ulysse en mendiant, comme l’a suggéré encore une fois la déesse. On remarque aussi, que ce chœur de femmes, au-delà du simple fait de commenter les évènements présents, connaissent également la suite de ceux-ci. Elles ont une position décalée par rapport aux autres personnages puisqu’elles n’interviennent jamais dans l’action réellement. Elles établissent en quelque sorte le lien entre les protagonistes et les spectateurs, mais aussi avec les dieux. Ces femmes ont en effet quelque chose qui serait de l’ordre du divin. Elles apparaissent comme des sortes de nymphes, ou semi-déesse, voir même prophétesse. C’est à travers elle que serait représenté les interventions divines de la déesse Athéna. Elles sont donc à la fois entre les personnages et les spectateurs et entre les hommes et les dieux. De plus la présence d’Athéna accentue également l’aspect onirique et imaginaire de la pièce. Il s’agit en en effet d’une divinité, sa présence est donc normalement impossible, si ce n’est dans un rêve. La présence d’Athéna aux cotés d’Ulysse fait rêvé le spectateur et rappelle tout le côté merveilleux de l’Odyssée. Lors du massacre, Athéna se trouve en haut d’une des colonnes du palais, à l’avant scène. Vêtue et parée avec tous les accessoires qui lui sont attribués dans l’antiquité grecque, Athéna surplombe le massacre aidant Ulysse à vaincre les prétendants, en lui donnant force et courage. Athéna est la déesse de la métamorphose et c’est grâce à elle qu’Ulysse ne se fait pas reconnaître des prétendants lors de son arrivée à Ithaque : elle fait descendre des cintres, des cieux, un déguisement de mendiant comme « par magie », qui permettra à Ulysse d’établir son plan de vengeance en toute discrétion. Son côté divin intervient notamment lorsqu’elle vole, suspendue à un câble au dessus de l’espace scénique, cela montre bien qu’Athéna bien que parfois déguisée (par exemple enfant, lorsqu’elle guide Ulysse chez Alcinoos ou autre), et mêlée aux hommes, elle garde son statut de déesse et se trouve à un niveau donc supérieur. C’est une déesse de l’Olympe, des cieux. Et cela montre également son caractère bienveillant, tout en impressionnant le spectateur. Mais Athéna n’est pas la seule divinité à intervenir dans la pièce. Lorsqu’Ulysse après le massacre rend visite à son père Laërte, Zeus par le biais d’un arbre, s’adresse à Ulysse. L’arbre en effet installé pour représenter le fait qu’Ulysse quitte le palais et retourne voir son père dans la « forêt », « campagne », prend vie sous les yeux du spectateur, il est illuminé du plafond par un projecteur, et la simple voix de Zeus le fait vivre. Cela rappelle notamment beaucoup le buisson qui sous les yeux de moïse prend vie, et à travers lequel « le père des hommes » lui indique ce qu’il doit accomplir. Cette scène, aux références évidentes, transporte donc littéralement le spectateur dans l’imaginaire, le merveilleux et le fantastique.
Or, malgré tout cela, la mise en scène, tout comme le texte de Strauss est très contemporaine. Les traces de l’Antiquité et la dimension onirique viennent en effet s’opposer à un espace et une représentation des personnages résolument contemporaine, moderne. L’espace de colonnes et d’escaliers que nous avons décrit précédemment est en même temps placé dans un espace entièrement bétonné. Le dispositif scénographique apparaît onc comme tout d’abord réaliste et en même temps laisse percevoir une certaine dimension onirique. Selon Martinelli on ne peut pas actualiser le retour d’Ulysse à Ithaque complètement, seulement sur certains points. La modernisation passe d’une part, par les costumes et surtout le changement de costumes d’Ulysse, lorsque celui-ci est en mendiant on pense tout de suite au mendiant d’aujourd’hui, à l’homme pauvre qui erre dans les rues de la ville. L’historien François Hartog dira notamment à ce propos qu’ « Ulysse, d’un point de vue général, est au fond une expression de la condition humaine ». De plus Ulysse, interprété par le comédien Charles Berling, est montré dans sa dimension humaine : Ulysse apparaît comme épuisé par la guerre et par son voyage. Il pleure notamment sur scène lorsqu’il se rend compte qu’il vient de massacrer des hommes (les prétendants). Tout comme Athéna, Ulysse est le symbole de la ruse, de la dissimulation. Or, dans cette pièce Ulysse justement par la ruse doit à la fois reconquérir son statut de roi d’Ithaque mais également sa place aux côtés de Pénélope. Martinelli met l’accent sur Ulysse en tant que comédien, qui joue la comédie devant les prétendants. En effet le metteur en scène met l’accent sur la reconquête d’Ulysse d’un point de vue politique mais également familial : il modernise ou plutôt actualise le retour d’Ulysse à Ithaque en se sens, et y apporte une dimension réaliste. Car Pénélope est en effet une femme qui attend son mari depuis près de 20 ans ce qui est difficile. Interprétée par Ronit Elkabetz, Pénélope apparaît comme une femme forte, à la carrure imposante et à la voix grave. C’est une femme résistante, ne cédant pas aux avances des prétendants, supportant la solitude et l’attente. Pénélope est montrée comme une femme qui résiste aux aléas de la vie. Elle grossit pour se protéger justement des prétendants (ce qu’a imaginé Botho Strauss), et elle use donc elle aussi de l’art de la dissimulation. Et cette prise de poids peut être aussi assimilée à l’attente interminable de son époux Lorsque les prétendants complotent pour assassiner son fils Télémaque, Pénélope furieuse se confronte directement à eux. Elle reste en haut du proscenium, qui avance sur les prétendants et les fait reculer jusque dans la marre d’eau. Dans cette scène, Pénélope apparaît donc bien aux spectateurs, comme une femme, une reine, imposante et écrasante. Elle envahit l’espace par sa présence et sa voix. Son accent israélien fait notamment voyager le spectateur. Contrairement à l’Odyssée, où Pénélope n’est qu’un personnage second, c’est ici elle qui est mis en avant et qui détrône presque Ulysse du rôle principal. La relation homme-femme qui est un sujet très contemporain est beaucoup traitée par Martinelli. Il met la femme au premier rang, en donnant beaucoup de poids au personnage de Pénélope, et traite les retrouvailles du couple de manière très contemporaine, si ce n’est réaliste. En effet, ici, les retrouvailles du couple peuvent apparaître comme très froides : Pénélope ne veut pas reconnaître Ulysse, et lui en voudrait de l’avoir laissée seule aux prises avec le quotidien des soupirants. Elle le fait attendre avant de le faire rejoindre le lit conjugal, ce qui n’est pas dans l’Odyssée d’Homère. Martinelli joue sur le fait des retrouvailles distantes, de la redécouverte de l’autre, etc. Ce qui est une vision et une interprétation particulièrement moderne du couple séparé depuis une vingtaine d’années. Mais il n’y a pas la relation Ulysse-Pénélope qui est modernisé, il y a en effet la relation entre les hommes et les femmes en général avec la représentation des prétendants. Les prétendants sont un groupe de jeunes hommes vêtus en effet de manière contemporaine, et même comme des hommes d’affaires en costume cravate ou en homme de la « jet-set » avec le col ouvert et les lunettes de soleil. Ils apparaissent comme des coureurs de jupons, courtisant les servantes de Pénélope et n’attendant qu’une chose, avoir le pouvoir. Les prétendants sont littéralement représentés comme un groupe de « frimeurs », vivant dans la débauche. Leur façon de parler (parfois grossière) et leurs costumes est sans nul doute ce qui il y a de plus moderne, de plus contemporain dans la mise en scène de Martinelli. Cette représentation des prétendants pourrait être perçue donc comme une critique de la société d’aujourd’hui, la société de consommation ou encore comme une critique politique. De plus lorsqu’Ulysse enlève son costume de mendiant et réussit à traverser avec la flèche de son arc les douze haches, les prétendants qui se montraient comme étant des hommes forts et courageux, à la virilité affirmée, sont en fait ici littéralement effrayés par le personnage d’Ulysse qui les menace de son épée. Ils n’assument pas leurs actes et sont tournés en ridicule, se cachant les uns derrière les autres. Ulysse a caché leurs armes, qui la en revanche sont des armes antiques (javelots, épées, etc.), ils sont alors pris au piège. Enfin, après le massacre, le spectateur assiste à un conflit des générations. En effet lorsqu’Ulysse vient voir son père Laërte, Télémaque les rejoint, pour prévenir son père du combat qui se prépare. Le grand-père, le père et le fils sont réunit et on a alors un rapport au temps particulier, puisque chaque personnage de par son costume est représentatif d’une époque : ce qui se voit notamment au niveau des costumes. Laërte, avec sa barbe et vêtu d’une toge noir va rappeler bien évidement tout ce qui se rapporte à l’antiquité grecque. Tandis que Télémaque, lui est vêtu comme un jeune homme d’aujourd’hui.

Jean-Louis Martinelli met donc en scène Ithaque de Botho Strauss, en prenant bien en compte le rapport antique/contemporain qu’il ancre dans son texte : de par la scénographie, la représentation des personnages, leurs relations, et les images poétiques crées sur le plateau, etc. Cette mise en scène provoque la réflexion chez le spectateur attaché à la représentation antique et onirique de l’Odyssée. Tantôt Martinelli fait rêver le spectateur et cherche à développer sa capacité d’imagination, tantôt il le ramène à la réalité : il gère avec subtilité ce conflit des générations. Cette mise en scène fait voyager le spectateur entre le monde réel et le monde de l’imaginaire, entre le monde contemporain et antique, voir même futuriste. Le spectateur approche le texte d’Homère d’une manière originale, qui à la fois le fait toucher du doigt des problèmes contemporains et en même temps lui fait connaître (ou lui fait redécouvrir) un des textes fondateurs de notre histoire qu’est celui de l’Odyssée.

Extrait d'analyse d'Ithaque.



Ithaque est une pièce retraçant le retour d’Ulysse dans sa patrie d’où son nom Ithaque, est le dernier chant de L’Odyssée. Nous sommes alors confrontés aux retrouvailles du couple d’Ulysse et de Pénélope, mais également du combat que doit mener Ulysse afin de récupérer ses biens ( son épouse, son palais,…). Nous pouvons alors nous demander pourquoi mettre en scène une épopée quasi mythique, que tout le monde connaît car rare sont les personnes n’ayant jamais entendu les aventures d’Ulysse . Nous pouvons également nous demander pourquoi Jean-Louis Martinelli a voulu s’approprié Ulysse et ses aventures le temps d’une mise en scène, car en choisissant une épopée antique et « archi-connue » il y’avait un risque considérable. Ce qui nous amène à nous poser la question suivante : Comment jouer une épopée antique tout en la réinventant afin qu’elle soit moderne, et qu’elle corresponde à notre époque actuelle. Afin de répondre à ces questions, et cerner les enjeux d’Ithaque, nous traiterons l’axe suivant : les représentations inhabituelles et contemporaines des personnages.


 



 


Ithaque, est une « réécriture » des derniers chants de L’Odyssée, cette écriture a alors conserver des éléments de cette œuvre, mais également se basé sur d’autres œuvres telles que L’Iliade, notamment afin de donner une description des personnages.


Dans Ithaque, le comédien jouant Ulysse est un homme assez vieux ce qui fait écho à ses vingt ans d’absence ainsi qu’au poids de ses aventures qui lui ont « dérobées » sa jeunesse. Le comédien a donc un corps vieux, pas spécialement harmonieux et pas spectaculaire contrairement à la vision du spectateur qui image un homme viril, beau, fort et bien battit suite à sa description dans l’Odyssée. En prenant le comédien Charles Berling afin d’interpréter Ulysse, Jean-Louis Martinelli a fait le choix de représenté un Ulysse victorieux de part sa ruse. Cependant cette représentation d’un homme sage fait de l’Ulysse d’Ithaque une sorte d’anti héros. Celui-ci ne parvient pas à s’exprimer clairement au début de la pièce, il bégaye, et pleurnichera à plusieurs reprises, comme dans la scène suivant le massacre Ulysse s’effondrera et pleura comme une enfant, c’est alors la nourrice qui s’occupera de lui et l’assiéra sur une chaise en bois qui ressemblera étrangement à celles des petits enfants. Ulysse est alors caractérisé comme un homme vieux, sage, sensible qui lui donnera l’image d’un homme-enfant ce qui ne correspond pas à la vision « universelle » que l’on se fait de ce personnage. Dans L’Odyssée, Ulysse est une héros extraordinaire de part son inventivité et est une victime de sa beauté auprès des femmes et déesses telles que Calypso ou Circé. Contrairement à l’Iliade où Ulysse n’est tout d’abord pas un personnage central à l’intrigue et est connu grâce à ses plans un peu saugrenus et ses tromperies permanentes, il n’incarne pas le personnage héroïque contrairement à celui de L’Odyssée. Nous pouvons alors penser Strauss s’est principalement inspirer de l’Iliade afin de dresser le portrait d’Ulysse tout en utilisant les aventures de celui-ci évoquées dans L’Odyssée.


Le personnage de Pénélope a également été confrontée au changement d’époque dans la mise en scène d’Ithaque. La comédienne jouant Pénélope est Ronit Elkabetz, une femme très orientale de part son accent et ses rondeurs. Le choix de Jean-Louis Martinelli s’est alors poser sur la représentation d’une Pénélope étrangère et guerrière. Lors des premières apparitions de l’actrice celle-ci est énorme da part sa corpulence, elle semble monstrueuse à cause de cette difformité : son visage et très beau et son corps assez laid. Elle ne peut se déplacer seule, elle est essoufflée à chaque mouvement, elle semble pathétique, ridicule comme vulnérable en l’absence de son époux. Même les symboles de féminité sont ici répulsifs, sur sa robe bordeaux une sorte de soutien gorge est dessiné en viole, cela fait alors ressortir son importante poitrine qui n’a plus la connotation d’un certain érotisme. Cependant cette difformité cache l’intelligente de celle-ci car elle a dissimulée son propre corps, en effet lorsque la nuit tombe celle-ci ôte sa robe bordeaux bouffante qui lui donne cette allure. C’est alors afin d’effrayer et de repousser les prétendants qu’elle se déguise, par ailleurs cette astuce met en avant sa puissance, elle n’est pas seulement un épouse attendant son mari mais une battante et une reine. Même si la robe insiste sur sa monstruosité et son étrangéité, celle-ci lui permet également d’exercer son autorité, ses fromes font de ce personnage une guerrière prête à se battre afin de conserver son palais et de garder dans les mémoires le souvenir d’Ulysse, elle doit résister à l’omniprésence et l’arrogance des prétendants qui ne croient guère au retour d’Ulysse. D’ailleurs lorsque celle-ci sermonne les prétendants sur leur comportement irrespectueux envers elle, Télémaque, Ulysse et son palais, l’estrade avant vers eux comme si la colère de Pénélope était telle qu’elle parvenait à touché physiquement les prétendants; par ailleurs ce dispositif scénique n’est pas sans rappeler celui du théâtre antique (skéné). L’accent de la comédienne ainsi que son maquillage font référence au voyage notamment à l’Orient, son maquillage avec beaucoup d’eye liner fait penser à une autre femme très puissante qui est Cléopâtre quant à son accent celui-ci apporte une certaine mélodie à son discours qui peut faire penser à celui des sirènes ( même si ces deux « chants » n’ont pas les mêmes connotations). Cette représentation de Pénélope est très surprenante, car c’est elle qui incarne la figure du héros en quelque sorte car comparé à un Ulysse qui se complaint de leurs pleurs même lorsqu’il arrive chez lui, Pénélope semble avoir beaucoup plus de poids face au « chaos » qui règne à Ithaque. C’est comme si dans cette pièce, il y avait une inversion de la figure du pouvoir, qui correspond sans doute à l’évolution du statut de la femme qui est à présent égal à celui de l’homme, peut-être que Botho Strauss souligne le fait que la femme est autant capable de régner qu’un homme, si ce n’est mieux que celui-ci. Contrairement à L’Odyssée où Ulysse est le personnage dominant et où la seule fonction de Pénélope est de l’attendre.


Dans Ithaque, les prétendants sont habillés en costume noir et la plupart portent des lunettes de soleil. Leur rôle n’est traité différent si ce n’est qu’ils ressemblent à de vrais machos qui ne voient qu’en Pénélope un trône et rien d’autre. La figure des prétendants peut être assimilée à celle de la mafia du fait qu’ils soient manipulateurs et « profiteurs », ils escroquent Ulysse en mangeant toutes ses bêtes et en s’acharnant sur son épouse Pénélope. Tout comme l’actrice Ronit Elkabetz, la majorité des prétendants ont un accent afin de rappeler le fait qu’ils viennent de régions différentes et qu’ils viennent seulement conquérir une autre terre, leur intérêt est donc politique. La représentation de Télémaque est quasi similaire à celle des prétendants, il est jeune et est vêtu de noir, en l’absence de son père c’est alors à lui de prendre le pouvoir cependant il ne semble pas assez fort et ne parvint à chasser les prétendants.






En conclusion , Jean-Louis Martinelli donne des images à disposition du spectateur afin que celui-ci imagine le massacre ou la figure de Zeus. Chacun à sa propre vision de l’Odyssée et c’est pour cela que le metteur en scène nous « laisse le choix » afin de nourrir notre imagination. Grâce à de nombreux dispositifs scéniques Jean-Louis Martinelli a su faire voyager Ulysse et son palais à notre époque, même si l’intrigue reste inchangée la mise en scène et le texte de Botho Strauss transposent les problèmes politiques, familiaux à un homme contemporain. Cependant cette comparaison entre la figure d’Ulysse et un homme moderne pose la question suivante : Est-ce qu’un homme serait il prêt à utiliser la ruse, la dissimulation, l’art du langage afin d’atteindre comme Ulysse son objectif ?

Analyse spectacle: Ithaque M/S Martinelli

La pièce Ithaque est mise en scène par Martinelli. Cette pièce est en quelque sorte une reprise de L’Odyssée d’Homère, puisqu’elle raconte l’arrivée d’Ulysse dans sa patrie qui est Ithaque. Mais c’est aussi le « nouveau » texte de Botho Strauss, grand auteur allemand dramatique contemporain, que Martinelli décide de prendre comme support. Nous pouvons alors penser que Martinelli a simplement voulu mettre en scène cet épisode et non l’épopée toute entière. En effet lui-même dit que la pièce « raconte la fin de L’Odyssée ». Le fait de mettre en scène cette pièce aujourd‘hui, permet dans un premier temps de retrouver un des textes fondateurs de la littérature française (qui est donc le texte d’Homère), bien qu’il soit déformé et retranscrit. Ce texte nous permet de nous poser des questions sur la société et notamment la question sur la politique. Comment un peuple survit-il lorsque son représentant n’est plus là pour régner et s’occuper du pays. Cependant, ici nous allons aborder principalement la question de la mise en scène et de la modernisation de la pièce. Pour essayer de répondre au mieux à cette question de « modernisation » nous allons nous focaliser sur le traitement que fait Martinelli sur l’arrivée d’Ulysse en sa « claire Ithaque »? Nous allons parler de son rapport aux personnages, en tant que tel, mais plus particulièrement sur la mise en scène et sur le parti pris du metteur en scène. Dans un premier temps nous verrons comment la pièce à été modernisée, par quels moyens, puis nous traiterons le passage du massacre enfin nous terminerons par parler des retrouvailles entre Ulysse et Pénélope. Le début de la pièce commence donc par l’arrivée d’Ulysse. Le spectateur est surpris de voir un cours d’eau sur la scène, qui représente la mer. La représentation d’Ithaque n’est pas vraiment faite puisque l’on ne voit pas une cité ou une ville, mais plutôt le palais d’Ulysse. En effet toute la pièce est joué dans le palais. Lorsqu’Ulysse s’échoue sur sa terre, il ne la reconnait pas de suite. L’élément qui permet au spectateur à lui faire penser, comprendre qu’Ulysse vient d’arriver à Ithaque c’est le rideau transparent qui forme une sorte de rocher. En effet c’est un rideau transparent sur lequel est retransmit l’image d’un rocher. Il y a donc une dimension cinématographie de cette arrivée qui nous permet de dire que d’entrée de jeu il y a une modernisation. Martinelli ne choisi pas de représenter Ithaque de manière antique mais plutôt moderne, voir imaginaire puisqu’elle n’est pas réellement représentée.
En ce qui concerne le palais, c’est un espace très « métallisé ». Devant le spectateur se trouve une immense escalier qui forme un « bloc » de béton, c’est sur cet escalier que se trouve la chambre conjugale des deux amants. Le palais est délimité par des sortes de colonnes. Ces colonnes ne sont pas en pierre, ce qui renforce le fait que Martinelli actualise la pièce. Autre chose, les grands escaliers sont capables de se déplacer vers le spectateur, comme si il allait entrer en coalition avec nous. C’est comme par magie que ce grand bloc d’escalier se déplace. Dans cette mise en scène, tout est modernisé et imaginé, rien ne semble réel, si ce n’est la nourriture. En effet le seul élément « antique » présent sur scène est le vin, le pain, les raison, etc. Même l’arc d’Ulysse est en quelque sorte changer en arc magique: il passe au travers d’anses qui font comme des feux d’artifices. Ici la mise en scène tombe presque dans quelque chose de « kitch » . En effet, l’épisode où Ulysse tire à l’arc il y a un effet de surprise, comme si nous étions non pas dans l’antiquité mais dans une fête foraine. Le contexte est déplacé ailleurs. Il n’a donc plus son sens premier.
Jusqu’ici il n’y avait que le texte et la mise en scène qui étaient modernisé et devenu contemporain. Avec l’arrivée des prétendants tout bascule. En effet, alors que le personnage d’Ulysse et d’Athéna gardent leurs image antique: par exemple Athéna est représentée par la divinité et le pouvoir: les prétendants eux sont complètements modernisés. Ce sont des personnages totalement arrogants et sans scrupules. Ils ont des costumes d’aujourd’hui: des lunettes de soleil Rayban ou encore des converses. A l’opposé, Athéna porte à un moment donné une armure qui rappelle l’époque d’Homère. Ulysse porte des vêtements d’aujourd’hui mais ils ne sont pas aussi imposants et « faux » comme ceux des prétendants. En effet ce « personnage » interprétés par un groupe d’homme est une critique de la société « machiste » de nos jours, ou des années auparavant.
Ces prétendants sont ceux qui, depuis le départ d’Ulysse, ont pris le pouvoir du palais et de la cité. Un d’eux doit normalement succéder à Ulysse au près de Pénélope. Martinelli décide de les représenter comme des hommes faux, grossiers et presque comme des bêtes. Afin de créer une sorte de « dégout » pour eux, comme les sentiments de Pénélope.
Comme nous l‘avons dit ce n‘est pas le texte d‘Homère qui est ici employé mais celui de Botho Strauss, un écrivain dramatique allemand. Cet écrivain à choisi de traduire le texte d’Homère sous une forme très moderne et un peu plus accessible à tous. En effet, le texte est simple et fluide. Pour la traduction de ce texte, Botho Strauss s’est basé sur la société d’aujourd’hui qui est régie par « le sport, la frime et la débauche ». Nous pouvons voir que ces trois qualificatifs sont très représentants et renvoient à la mise en scène de Martinelli. Le sport peut être associé aux aventures d’Ulysse, la frime au personnage des prétendants et la débauche à la souffrance de Pénélope, et à ce qu’est devenu le palais, voir la cité d’Ithaque. Ainsi dans cette pièce il n’y a aucune hésitation à employer des mots vulgaires: notamment pour les prétendants.
Bien que le spectateur soit surpris par cette transformation, je pense que celle-ci lui permet de comprendre davantage le récit.
Alors que le massacre est en quelque sorte le moment le plus attendu des spectateurs il est ici simplifié. En effet, depuis l’arrivée d’Ulysse on n’attend que sa vengeance au près des prétendants: c’est à ce moment qu’il pourra reprendre le contrôle de sa patrie et qu’il pourra retrouver sa femme Pénélope. Cependant ce moment est en quelque sorte « décevant » puisqu’il est caché. C’est sans doute pour une question de pudeur et de maîtrise de la mort et du massacre au théâtre que Martinelli à fait ce choix de mise en scène. Alors que tout se déchaine sur scène, un grand mur cache la bataille: le spectateur n’entend que les cris. Ce massacre est simplifié à cause du fait qu’il n’est pas réellement montré: sans doute Martinelli ne savait pas comment représenter ce massacre et c’est pour cela qu’il à fait ce choix. Cependant, quelque chose qui est assez beau et surprenant c’est l’écoulement du sang qui s’opère sur ce « mur ». Plus on avance et plus on se rend compte que derrière ce rideau/mur c’est un chant de bataille qui se déroule: le sang est donc le signe de la mort et de la vengeance.
Lorsque ce « mur » disparaît nous sommes face à la scène d’ « après le massacre », c’est une image assez magnifique qui vient à nous. Tous les corps des prétendants sont ensanglantés et déchus, que ce soit sur les escaliers ou sur le sol. Je pense que d’avoir posé des cadavres sur les escaliers qui mènent à la chambre conjugale est une image pour faire comprendre au spectateur que tous ces hommes ne sont que des faibles. Ulysse est le seul guerrier, le seul héros et le seul maître des lieux. Cette image montre le pouvoir et la grandeur d’Ulysse, c’est un champ de bataille mais presque glorieux qui nous est dévoilé. De plus, ce qu’il veut c’est reconquérir son peuple et sa femme, il est à la quête sur le plan familial et politique. Ainsi il est montré dans un aspect de désir, d’envie et de guerrier. Le spectateur ne prend aucune pitié de ces prétendants puisqu’ils ont une conduite déplorable et pitoyable envers tous les autres personnages. Ce massacre est d’autant plus troublant et mystérieux qu’il à des allures d’un film. En effet, nous n’avons plus vraiment l’impression d’être dans une salle de théâtre mais plutôt dans une salle de cinéma: le jeu des lumières, ce sang qui coule comme quelque chose de magique sur le mur et les cadavres sont comme intouchables, irréels. C’est une sensation que l’on n’éprouve que lorsqu’on est au cinéma.
Enfin, une des dernières images incroyable de ce massacre c’est lorsque tous les prétendants se relèvent pleins de sang et tombent dans un grand « trou » au milieu du plateau. En effet, un à un, les prétendants vont « chuter » dans un gouffre. C’est comme s’ils étaient aspirés par les enfers. Ainsi cela ne fait que montrer une fois de plus que ce sont des hommes sans scrupules et qu’ils n’ont mérité que ce qu’ils ont eu: ils sont montrés comme des infâmes et leur mort n’est que le fruit de ce qu’ils ont semé.
Enfin, Martinelli traite de façon très inattendue les retrouvailles entre Ulysse et Pénélope.
Comme pour la représentation du massacre, Martinelli prend un parti pris assez surprenant en ce qui est de la représentation des retrouvailles entre les deux amants.
En effet alors qu’ils ne sont pas vus depuis vingt ans leur rencontre est plutôt froide et distante. Pourquoi Martinelli a-t-il choisi de laisser une certaine distance entre ces personnages? Est-ce parce que l’arrivée d’Ulysse est pour lui avant tout l’arriver d’un guerrier, d’un héros de guerre, et non d’un mari? Peut-être. En tout cas, je ne pense pas que ce soit l’arrivée d’un amant épris de chagrin d’avoir été séparé de sa femme depuis si longtemps. Bien qu’il représente Pénélope comme une femme déchue sur son lit. Alors que tout le long de la pièce elle semble se lamenter de l’absence de son mari, pleurant sur son lit, une fois face à lui elle semble se contenir. Pénélope est représentée comme une femme en démens qui pleure l’absence de son mari, elle incarne également la femme au statut de puissance. Du haut de ses escaliers elle semble dominer l’espace et tout ce qui s’y trouve en dessous, en effet elle est au sommet des autres, c’est elle la plus haute: que ce soit au sens propre comme au sens figuré. Lorsqu’elle apprend le retour de son Ulysse, peut-être a-t-elle peur de perdre ce statut? Maintenant qu’Ulysse est de retour, tout va rentrer dans l’ordre et elle n’occupera plus qu’un statut de femme.
Ces deux personnages sont très distants l’un de l’autre, c’est comme s’ils se connaissaient à peine. Ce n’est qu’au bout de quelque minutes qu’ils prennent confiance en eux, comme s’ils voulaient être sur, comme si le fait d’avoir été séparés depuis si longtemps les avaient rendus comme des inconnus l’un en vers l’autre, et qu’ils s’enlacent et s’échangent leur amour.
Dans sa mise en scène Martinelli prend un parti pris principal: celui de la modernisation. En effet il essaye de retranscrire le parcours d’Ulysse de nos jours, il souhaite que le message d’Ulysse soit compris à travers tous ses spectateurs. Ce parti pris n’est sans doute pas le plus perspicace ou le plus juste, cependant il apporte une touche « nouvelle » qui permet au spectateur de se plonger plus dans le cœur de l’action. La représentation des personnages et leur rapport à nous et si proche qu’on ne sent pas le fait que ce soit un texte si ancien. Ainsi c’est à travers cet image moderne et impressionnante que Martinelli fait rentrer son spectateur dans le récit et l’arrivée d’Ulysse à Ithaque.

Analyse de specacle/ Ithaque/Jean-Louis Martinelli/ Nanterre



Jean-Louis Martinelli choisi une adaptation de l’Odyssée d’Homère assez différente de celle que nous connaissons et très recadrée, autour du retour d’Ulysse en Ithaque et de ses retrouvailles avec son peuple, quitté depuis 20 ans. Il choisi donc la pièce nommée « Ithaque » de Botho Strauss, qui modernise et adapte ce texte magnifique et poétique dans une langue parfois plus vulgaire et crue. Il glace l’aspect poétique sans pour autant se défaire de l’aspect divin et merveilleux. Par rapport à ce texte déjà très engagé par rapport au mythe d’origine, quel type de mise en scène, et pour quels partis-pris opte le metteur en scène ?


I) L’héroïsme humain et divin dans l’Odyssée

A) La place et l’importance de la femme


La pièce de Botho Strauss accorde une importance inédite à la femme dans l’Odyssée. Et Jean-Louis Martinelli s’emploie à le mettre en scène. Ulysse n’est pas le seul héros de ce voyage, ni le seul vagabond, Pénélope aussi ici est présentée comme une héroïne guerrière, encore plus courageuse et forte qu’Ulysse lui-même. En effet, c’est une femme extrêmement imposante qui est tout d’abord présentée, d’une part elle est élevée sur une haute estrade et d’autre part elle apparaît sous une forme presque monstrueuse. Sa bruneur, son imposante carrure ainsi que sa voix rauque et accentuée lui donnent une puissance inédite. Nous avions vu Pénélope comme une frêle créature séductrice en attente désespérée d’un homme dont elle était éperdument amoureuse, et je pense que Laurine, avec sa blondeur et sa finesse incarnait parfaitement cette image d’une jolie et fine Pénélope. Mais cette une image en contradiction complète avec notre vision que Martinelli nous présente ici, celle d’une guerrière. Et je pense que la figure de cette femme est la plus précise et parfaite pour ce personnage, car finalement elle connaît la guerre au moins tout autant qu’Ulysse, celle contre la solitude, celle contre le chagrin, et bien sûr celle contre les prétendants. Nous sommes face à une femme déchirée, mal menée qui a dû combattre la violence et la tentative sans cesse répétée de carnivores sexuels que sont les jeunes prétendants. Lorsqu’elle raconte ses manipulations, ses entreprises pour leur résister apparaît la dimension de sa force incroyable, qui dépasse de loin celle d’Ulysse, qui n’a pas seulement souffert durant ses 20 années d’errance, il a tout de même passé 1 an dans le grand lit de la belle Circé, et 7 dans la grotte de la nymphe Calypso. Tandis que Pénélope, elle, n’a cessé de se battre, pendant 20 ans, et son premier combat est conté au travers du linceul qu’elle tisse et détisse. Voilà donc pourquoi, sa bruneur, son aspect mystérieux et ample, me paraît si approprié. Je pense que JL. Martinelli lui offre une profondeur essentielle, il la rend presque masculine dans cet aspect monstrueux, car l’homme guerrier est reconnu à sa carrure. Ici le guerrier qu’est Ulysse est légèrement tourné en dérision avec un acteur peu crédible dans le rôle du vaillant et peu musclé, comparé à cette stature immense et ténébreuse qu’est la Pénélope de Martinelli. Jamais Pénélope ne se laisse abattre, jamais elle ne perd sa beauté et jamais elle ne se laisse aller aux larmes, alors que son mari, le soit-disant grand guerrier pleurniche ridiculement dans les bras de sa nourrice.

Ulysse est sans cesse accompagné d’Athéna, que l’on voit beaucoup sur scène, sous toutes ses formes, de la plus masculine à la plus sensuelle. C’est encore selon moi une façon de mettre en valeur la femme dans cette histoire, qui n’est pas seulement une épopée masculine. Car en lisant l’Odyssée on peut voir clairement qu’Ulysse est parfois un être sans défense et plutôt peureux, c’est d’ailleurs comme ça que l’incarne (sûrement malgré lui) Charles Berling, avec une tendance parfois au ridicule, mais jamais il n’aurait été ce héros sans la présence des femmes et d’une en particulier. Athéna est sans cesse présente à ses côtés, c’est elle qui le protège de la mort à de nombreuses reprises et c’est grâce à elle qu’il rentre chez lui. La figure d’Athéna est ici présentée par Martinelli avec une grande douceur au début, puis petit à petit il fait ressortir l’importance de son rôle et sa puissance aux côtés d’Ulysse. Lui, est présenté (comme le veut le texte original) comme un gueux, vieillard et boiteux, tandis qu’elle à mesure que la pièce avance prend une épaisseur et dévoile sa beauté. Martinelli le met en scène en dévoilant le corps d’Athéna, en la mettant en lumière, notamment lorsqu’elle apparaît volant au dessus de la scène, ou reflétée sous forme d’hologramme sur les marches, ou encore lorsqu’elle est en haut d’une des tours, éclairée, telle une guerrière. Le metteur en scène fait ressortir l’importance d’Athéna aux côtés d’Ulysse.

Mais encore les trois parties du corps complémentaires, Épaule, Genoux et Poignet telles que les nomme Botho Strauss dans sa pièce écrite. Elles sont souvent mises en avant, soit dans leur union avec d’autres puissances féminines, comme Pénélope, lorsqu’elles l’accompagne dans son changement en mariée (elles sont alors vêtues de blanc) ou Athéna, ou alors placées au-dessus des hommes, comme lors du massacre. Leur unité leur donne une prestance qui interpelle. De plus, elles sont toujours placées à l’avant-scène face au public. Elles sont une sorte de chœur, d’accompagnatrices des personnages, une sorte d’aède qui conte et explicite l’intrigue. Elles racontent notamment le massacre des Prétendants, qui bien que trop peu sanglant à mon goût, est tout de même assez puissant grâce à elles. En effet, nous voyons un rideau en cotte de maille tomber devant le massacre et se refléter dans l’eau, ce rideau rappelle évidemment l’armure du guerrier, mais ici puisque ce sont ces trois femmes, vêtues de blanc qui sont en scène, l’armure et le courage de la femme. En effet, sous leurs habits purs apparaissent trois guerrières aux voix glacées et percutantes. Je trouve que ce massacre prend une dimension spectaculaire et impressionnante grâce à leur présence. C’est une toute autre vision que celle que nous avions présentée, mais il ne manque pas de marquer le spectateur et d’être réellement fascinant et presque ensorcelant. Elles apparaissent tells des prophétesses mystérieuses dont on ne comprend tout d’abord pas bien la présence mais qui garde néanmoins tout au long cet aspect envoûtant. C’est de cette manière d’ailleurs que je perçois le personnage de Cassandre, dans cet accord et cette complémentarité envoûtante et heurtante. Elles ont une force à trois, qui semble une sorte de résumé de la puissance combinée de la vieille nourrice, d’Athéna et de Pénélope.

La modernisation de ce mythe qu’est l’Odyssée permet de remettre la femme sur le devant de la scène. Je pense que Jean-Louis Martinelli s’inspire beaucoup de l’évolution de la femme pour lui restituer cette « vedette » dont elle est privée par l’époque d’écriture de l’œuvre. Ainsi, il rappelle que l’homme n’est plus le héros grec d’autrefois mais que la femme, elle, a pris sa place au sein du monde actif. Et bien que Pénéloppe soit confinée chez elle à attendre son mari partit à la guerre, elle n’en est pas moins une guerrière, l’incarnation d’un courage et d’une force sublime. Martinelli met en scène l’évolution de la femme, qui ruse, qui combat et qui sait diriger sans homme. C’est pour cette raison je pense qu’il choisi une comédienne aussi imposante et puissante que Ronit Elkabetz.



B) L’image de l’homme héroïque et de la jeunesse violente et sexuelle


Avec tout ce que nous avons dit sur les femmes dans Ithaque je pense que nous pouvons introduire en disant que l’homme et la femme se partagent le statut de héros dans cette version de l’Odyssée. Nous allons commencé par Ulysse et le porcher, qui sont, les deux héros masculins de cette pièce. Ulysse est certes, le héros principal de l’Odyssée, mais ici il est présenté d’une certaines manière et perçu d’une autre selon moi. Pour rester dans la logique du texte Martinelli le dépeint comme un guerrier, capable de supporter la violence de ses adversaires, de vaincre un colosse de trois fois son poids. Mais en parallèle il en fait presque une victime des prétendants, puisque même sa victoire n’est pas transcendante. Ulysse est le héros et le sujet principal de cette épopée et ici il n’est pas celui que Martinelli décide de mettre le plus en valeur. C’est plus la figure d’un homme meurtri et presque pathétique qui ressort de l’interprétation de Charles Berling. Mais en fait, ce que nous montre Martinelli est un homme blessé, meurtri par son long et difficile voyage. L’arrivée d’Ulysse l’illustre d’ailleurs parfaitement, il est étendu, comme sans vie, ou épuisé, alors que le texte d’Homère dit qu’il dort, ici il semble être mort. Ce que nous montre d’Ulysse Martinelli est l’envers du décors. Pas tellement le héros fougueux, mais plus l’homme souffrant, enfin rentré chez lui et l’aspect pathétique qui nous apparaît est dû au fait que l’image que l’on se fait d’Ulysse est celle qu’un acteur Hollywoodien nous dépeindrait, celle d’un homme fort et sans faiblesses apparentes. C’est donc un Ulysse métamorphosé, bien moins vaillant, assez vieilli, beaucoup moins beau qui revient de cette épopée épuisante, il n’est d’ailleurs jamais reconnu. Mais la transformation n’est pas finie, parce que c’est aussi l’aspect que Martinelli choisi de traiter au travers des costumes. On voit un homme qui a parcouru le monde ainsi qu’un homme qui a parcouru le temps, d’abord un soldat portant un corset, puis un vieillard repoussant : cette transition en dit long sur le personnage à mon avis, qui a dû supporter ce long voyage, être courageux et faire bonne figure, mais une fois chez lui c’est tout le poids de son labeur qui lui retombe sur le dos, qui l’a vieilli et l’a affaiblit. La vieillesse est aussi le symbole de la sagesse, celle qu’Ulysse acquise pendant son voyage. Et enfin il suit le trajet global du spectacle au travers du temps : de l’antique à nos jours, il est contemporanéisé et revêt la veste noire sobre, qui rappelle les tenues des prétendants.

Mais le cocher vient contrebalancer cet aspect, en effet, il apporte à leur duo une dimension plus solennelle qui leur permet de former un duo « héroïque ». Il est la présence masculine sage et puissante qui seconde Ulysse dans son retour au palais.

Les prétendants sont l’illustration, au travers de leurs costumes, de leur jeu et de leur texte de l’actualisation de la pièce. Ce que nous dit Martinelli au travers de ces jeunes hommes débauchés, ultra lookés à l’allure jet set est que ces prétendants au pouvoir ne sont ni plus ni moins la jeunesse arrogante d’aujourd’hui. Des jeunes en quête de pouvoir, qui feraient tout pour l’obtenir, en passant évidemment par la violence et la menace, c’est universel. C’était vrai à l’époque comme ça l’est aujourd’hui. C’est pour ça notamment qu’il souligne le rappel à nos jours que fait Botho Strauss dans le texte en simulant un jeu télévisé, c’est le parti pris politique de Martinelli, la jeunesse au pouvoir et la débauche avec. Les médias, l’allure de beau gosse, la parade du pan, voilà ce qu’est la politique aujourd’hui. Une mascarade qui fait bonne figure devant les vrais représentants (Pénéloppe) et qui se venge sur les impuissants (Télémaque) mais personne n’est dupe de cette société qui met au premier plan les people et qui repousse les politiciens. Berlusconi fait de la chirurgie tandis que Sarkozy apparaît dans « Closer » à la rubrique « Bourlets ». La politique n’est qu’un mensonge filmé, une téléréalité, et c’est ça que veux dire Martinelli à mon avis lorsqu’il met en scène cette bande de bad boys mal élevés bavant devant la femme d’un autre et se battant comme des chiens pour obtenir le pouvoir.


II) Une mise en scène moderne et glaciale

A) Une scénographie politique qui traverse le temps


Sa mise en scène est à cheval entre l’antique et l’ultra modernité. Elle est entre le palais de ma famille royale et la maison blanche, elle est selon moi très politisée. Les marches rappellent l’aspect antique du palais, et la hiérarchie aussi, la reine en haut, les courtisans et pauvres en bas. Mais je pense que d’une manière générale la mise en scène est très significative du passage choisi par Botho Strauss. Martinelli met en scène la conquête du pouvoir par Ulysse et la guerre contre les prétendants ; la mise en scène est donc aussi très moderne pour rappeler l’aspect contemporain de la bataille au pouvoir par les partis politiques. Ainsi que futuriste, comme pour dire que cette course, cette guerre politique était vraie à l’époque d’Homère et le sera toujours demain.

La femme est placée en hauteur, au-dessus des autres, à la fois parce qu’elle est la dominante du pouvoir. Mais cela rappelle aussi le thème de la guerre de Troie, soit la bataille entre plusieurs hommes pour Hélène, ici la mise en scène renvoie à cela je trouve. Mais à la politique en générale, on fait la compétition pour obtenir les faveurs (sexuelles) de Pénéloppe, on fait campagne pour atteindre le poste de la présidence du pays. Mais le fait que la femme domine ici la situation complète fait penser à deux choses : la femme arrive dans la politique, l’homme perd son pouvoir irrévocable et si absolu sur cet exercice, la preuve en est qu’ici le pleurnichard c’est Ulysse et la guerrière (forte physiquement et moralement, la rusée) c’est Péneloppe. Mais aussi que les hommes sont finalement des chiens qui se battent pour ce qu’ils estiment être un morceau de viande : le corps de la femme, devant laquelle ils bavent et pour laquelle ils se battent.

La mise en scène est verticale, on a tout d’abord l’eau, puis la cour du palais, puis le palais lui même en haut des marches. L’eau symbolise le départ pour Troie, la guerre de Troie et le long et difficile voyage d’Ulysse entravé par Poséidon en mer durant 20 ans. Autrement dit c’est le passé, le malheur et l’errance qui sont symbolisés par cette eau. Le bas du palais, la « cour » est l’espace de la bataille, de la course au pouvoir, c’est l’agora violente, les guerriers pas vaillants ais fourbes et manipulateurs. Mais au –dessus de tout ça se trouve le palais, la sagesse et le courage de Pénéloppe, le lit qui est le lieu des retrouvailles avec Ulysse, l’avenir de la famille royale. Elle mime le trajet d’Ulysse, qui arrive en bas, étalé de tout son long dans l’eau, et qui ne reconnaît pas encore sa patrie : un voile flou cache les marches du palais. Puis, grâce à l’aide d’Athéna il intègre à nouveau son palais, pas par la voie royale puisqu’il est d’abord mêlé à ses opposants qu’il combat, après le massacre il retire son masque et rejoint Pénéloppe en haut des marches, sur le trône, le lit des retrouvailles amoureuses.


B) Un massacre plus symbolique qu’impressionnant


Tout le monde attendait du sang, des morts, du rouge, des tâches, des cris, une vraie bataille de mecs, en bref de l’explosif. Et tout le monde à été un peu déçu. Mais je ne pense pas pour autant que la vision du massacre par Marinelli soit un échec. Je pense qu’on peut le voir de deux manières, par la grande porte du gore et par la voie royale. La voie royale est selon moi celle que choisi Martinelli, une voie plus « noble » moins « tâche » certes … Mais assez puissante quand même grâce au rideau de cotte de maille en arrière plan qui se reflète sur l’eau telles des ombres venues des enfers. Il donne l’impression que les Erynies sont venues aider Ulysse dans son massacre, et les coulures de sang sur le rideau donnent selon moi une certaine puissance, plus subjective qu’une giclée de sang c’est sûr. En réalité c’est grâce aux trois femmes présence à l’avant-scène qui prononcent le récit du massacre avec une certaine solennité et puissance qui donne sa crédibilité au massacre, nous en avons déjà parlé dans le Ia) mais il est vrai que le massacre met finalement plus en valeur les conteuses que le fait lui-même. Martinelli se rattrape sur la suite en montrant les corps défunts des prétendants tachés de sang, mais surtout en les faisant tomber droits comme des piquets dans cette trappe au-dessous de la scène, c’est assez fort parce qu’ils ont l’air d’être aspirés par les enfers. Je pense que s’il choisi de ne pas le représenter c’est pour rester fidèle à sa vision politique de l’espace, le massacre peut se contenter d’être symbolique par rapport au parti pris principal. La guerre st aujourd’hui projetée sur les télévisions et apprivoisée par un journaliste filmé, et c’est finalement tout ce que l’on en voit, ici tout ce que l’on voit c’est des femmes qui racontent un événement sanglant, et une sorte d’écran ensanglanté, comme ce que l’on voit à la télévision : seulement du sang.